FIG. 9 (ci-dessous) : Appuietête
composite (kali), formé
de trois éléments de bois
liés avec de la fi bre de coco ;
la barre est incrustée de 57
disques d’ivoire de cachalot.
Fidji, début/moitié du XIXe
siècle ; 46 cm.
Collection privée ; ex collection James
Hooper, no 810.
FIG. 9 (ci-dessous) : Appuietête
composite (kali), formé
de trois éléments de bois
liés avec de la fi bre de coco ;
la barre est incrustée de 57
disques d’ivoire de cachalot.
Collection privée ; ex collection James
Hooper, no 810.
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FIG. 26 (EN BAS, À
GAUCHE) : Père Kirschbaum,
photo non datée montrant
une accumulation de
tabourets d’orateurs de
facture tardive.
Extrait de Howarth, Crispin. 2015.
Myth + Magic: Art of the Sepik
River, Papua New Guinea. Canberra,
National Gallery of Australia.
masques sous la supervision des experts. Pourtant
Gregory Bateson déclare n’avoir vu de tabourets
d’orateur que dans les grandes maisons cérémonielles.
Dans l’île de Chambri, c’est en effet ce que
l’on constate. Seules les maisons cérémonielles possédants
des oiseaux (usanasim, une métaphore se
référant à la présence de grandes poutres faîtières
surmontées d’oiseaux sculptés) sont pourvues d’un
tabouret d’orateur. Aussi cette hypothèse, quoique
séduisante, demeure peu fondée.
L’hypothèse de vols ou de pillages dans des villages
voisins et rivaux est à considérer. Il faut nous
tourner encore une fois vers Gregory Bateson et
objets sacrés, les vainqueurs n’auraient trouvé que
peu d’intérêt à garder ces trophées.
Quant à la capacité des tabourets d’orateur chez
les Sawos, les Manambu ou à Blackwater à entrer
dans la sphère des échanges à une époque ancienne,
nos informations sont trop minces pour pouvoir
étayer cette hypothèse. Enfi n, serait-il possible que
des explorateurs allemands aient fait usage de la
force pour acquérir ces tabourets ? C’est envisageable,
mais jusqu’à présent non documenté.
Ainsi la présence précoce de ces objets sacrés
dans les butins rapportés en Europe demeure
diffi cile à expliquer. On peut cependant douter
quelque peu simplifi ées des tabourets des grandes
maisons cérémonielles. On sait ainsi que les ntegal
des Iatmul et des Chambri sont les versions simplifi
ées des grandes maisons et que les jeunes hommes
y imitent leurs aînés. Les premiers tabourets arrivés
en Europe pourraient-ils avoir été faits pour que
des jeunes hommes s’entraînent au débat public ?
J’ai pu ainsi remarquer des caches dans la forêt
où les adolescents construisent des répliques des
masques utilisés par leurs aînés. Ils les utilisent en
secret, pour cacher à leurs aînés les premières maladresses
inhérentes à l’utilisation d’un masque par
une personne inexpérimentée. Lorsqu’ils gagnent
en aisance, ils rejoignent alors les sai, les lieux d’entraînement
offi ciels, où ils s’essayent à porter les
ses fi ches de terrain conservées à Cambridge pour
étayer cette supposition. D’assez nombreux objets
conservés à Cambridge, et rapportés par l’anthropologue
britannique, sont en effet décrits comme
provenant de pillages. Les guerres dites de Palimbe,
opposant les Iatmul à certains de leurs voisins lors
des premières années du XXe siècle, ont entraîné
des razzias et des pillages. Il semble qu’on pillait
ainsi les objets les plus sacrés comme les grands
tambours à fente ou les tambours d’eau (voir ceux
de Chambri acquis par Bateson au village de Malinge).
En l’état, il n’est pas possible de savoir si
les premiers tabourets collectés par les explorateurs
allemands auraient pu provenir de pillages et avoir
été cédés car une fois les ennemis privés de leurs
DOSSIER