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124 UN PORTRAIT ET UNE CHEMISE : Santiago Naranjo et FIG. 1 (EN HAUT À GAUCHE) : Henry C. Balink (1882- 1963), Santiago. Août 1940. Huile sur toile. 30,5 x 35,6 cm. Ex Chester College of New England. Tucson Museum of Art, don de la collection Howard et Marilyn Steele, inv. 2015.1.21. Avec l’aimable autorisation de Skinner, Boston. FIG. 2 (CI-DESSUS) : Agostino Donati (actif vers 1900-1945), portrait de Santiago Naranjo. 1928. Épreuve gélatino-argentique coloriée à la main. 11,4 x 16,5 cm. Collection privée. Henry Balink La vente Skinner d’art amérindien et ethnographique du 24 septembre 2011 à Boston comportait un lot qui n’était à proprement parler ni amérindien ni ethnographique. Il s’agissait d’un petit portrait encadré d’un vieil Indien d’Amérique vêtu d’une chemise de peau à franges et, dans le style Renaissance, portant dans le coin supérieur droit la signature de l’artiste et dans le coin supérieur gauche la mention « Santiago », du nom du sujet représenté (fi g. 1). Cette simple peinture est une fenêtre ouverte sur la richesse d’une histoire un peu oubliée, qui a changé la manière dont les Amérindiens étaient perçus. Elle a aussi mis en lumière un artefact rare. Hendrikus Cornelius Balink, né à Amsterdam en 1882, suivit de 1919 à 1914 à l’Académie royale des beaux-arts d’Amsterdam un enseignement de peinture classique, et plus particulièrement sur l’École de Barbizon. Fuyant la Première Guerre mondiale, lui et sa femme, Maria Wessing, déménagèrent à New York, où il gagna sa vie en réalisant des copies de tableaux du Metropolitan Museum of Art pour le compte de divers musées européens. Le couple s’installa ensuite à Chicago, où Balink réalisa des portraits pour des commanditaires privés ainsi que des fresques pour l’Institut d’art de Chicago. La découverte fortuite dans une gare d’une affi che de voyage pour Taos, Nouveau-Mexique, devait s’avérer décisive. Il visita Taos en 1917 et fi t par la suite plusieurs voyages dans le Sud-ouest avant de s’installer à Santa Fe en 1924. Son contact avec la Taos Art Colony (avec laquelle il devait développer des relations compliquées) et avec le Sud- Ouest lui-même rendirent sa palette plus lumineuse. En 1927, il fut chargé par le magnat du pétrole Ernest W. Marland de peindre huit portraits de fameux Amérindiens pour l’Indian Museum à la bibliothèque de la ville de Ponca. Balink fut rémunéré pour ce travail 2 000 dollars en or, l’équivalent de 100 000 dollars d’aujourd’hui. Réalisant que peindre des portraits d’Amérindiens était une entreprise rentable, il en fi t sa spécialité. Durant sa prolifi que carrière, il peignit des portraits de représentants de quelque soixante-trois tribus, ainsi qu’un nombre incalculable de scènes de genre représentant des Amérindiens et la vie du Sud-Ouest. Il mourut à Santa Fe en 1963. Le sujet de cette peinture est Santiago Naranjo, une éminente fi gure du paysage politique des villages du Nouveau-Mexique (fi g. 2), né vers 1849 dans la fameuse famille Naranjo de Santa Clara Pueblo. Dans une interview de l’honorable Frank Demolli, le petit-fi ls du défunt Santiago se souvient de lui comme d’un « marcheur », cela signifi ant qu’il marchait partout. Il connaissait bien le territoire autour de Santa Clara et Santa Fe, où il devint une fi gure réputée. Sa grande connaissance de l’environnement local l’amena à servir de guide pour nombre des premières expéditions anthropologiques consacrées à l’étude des ruines anciennes du Nouveau-Mexique. HISTOIRE d'objet Par Jonathan Fogel


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