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123 PAGE PRÉCÉDENTE, DE HAUT EN BAS FIG. 1 : Général Alfred Amédée Dodds (1842-1922). Vers 1900. Album de 510 célébrités contemporaines - 2ème collection Félix Potin (Kodak Inv. P. 1019/2), Folio 8, ph.101. Fonds Kodak-Pathé. Musée d’Orsay. © RMN-Grand Palais (musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski. FIG. 2 : Représentation du roi Béhanzin, dernier roi du Dahomey, sous l’apparence d’un requin. Attribuée à Sossa Dede, Fon, Bénin. Entre 1889 et 1893. Bois, clous de fer et pigments. H. : 168 cm. Don d’Amédée Dodds. Musée du quai Branly - Jacques Chirac, 71.1893.45.3. © mqB-JC / RMN-Grand Palais, photo : Patrick Gries. FIG. 3 (À GAUCHE) : Autel portatif, asen, aux emblèmes de Béhanzin. Attribué à l’atelier de la famille Lanmandoucelo Aïssi, Fon, Bénin. Avant 1892. Alliage cuivreux et argent. H. : 148 cm. Don d’Amédée Dodds. Musée du quai Branly - Jacques Chirac, 71.1895.16.4. © mqB-JC / RMN-Grand Palais, photo : Patrick Gries. Méconnaissance du droit, de l’histoire et mépris pour le contexte d’origine et le sort des oeuvres revendiquées, voilà un bien triste constat auquel s’ajoutent les ambitions politiques de certains et l’opportunisme d’autres qui voient, dans ce butin d’un temps passé, le trésor d’une guerre médiatique qu’ils pourraient exposer fi èrement en triomphe. Entre l’aridité des principes du droit, opposés sans explication, et la véhémence de propos, bienpensants certes, mais creux, une troisième voie est possible. Celle du dialogue, de la diplomatie et de l’éducation. La frustration de peuples qui constatent que la majeure partie de leur passé culturel se trouve aujourd’hui dispersée à travers le monde, doit être entendue. Des coopérations entre musées doivent être mises en place et favorisées. Le marché de l’art a également son rôle habituel à jouer pour autant que les élites africaines y investissent et offrent ensuite leurs collections aux musées de leur pays. Au lieu de toujours rouvrir les mêmes plaies, ne vaudrait-il pas mieux faire comprendre que l’art premier d’Afrique, pour ne citer que lui, est son meilleur ambassadeur. Depuis un siècle, d’exposition en exposition, de catalogue en catalogue, le génie des artistes africains fût révélé et la vision occidentale de l’Afrique totalement bouleversée. Quiconque aura visité le Musée royal de l’Afrique centrale à Tervuren (provisoirement fermé pour rénovation) ou le musée du quai Branly - Jacques Chirac dédié aux arts et civilisations d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques, et aura été touché par la beauté, la force et l’intelligence de ces créations de l’esprit, ne pourra plus jamais regarder ces peuples et leurs artistes avec un sentiment de supériorité, de peur ou de simple indifférence. L’art est bien, comme le disait Malraux : « Le plus court chemin de l’homme à l’homme. » « Suivant les termes du premier alinéa de l’article L. 451-5 du Code du patrimoine français, “les biens constituant les collections des musées de France appartenant à une personne publique font partie de leur domaine public et sont, à ce titre, inaliénables” ». Les collections publiques attachées aux musées de France ne peuvent en conséquence être vendues, données ou cédées sous quelque forme que ce soit. Pourtant, et alors même que la décision française était largement saluée, elle suscitait dans le même temps des réactions passionnées, lorsqu’elles n’étaient pas simplement hostiles. La France se voyait accusée de se refuser à voir son passé colonial en face et de se cacher derrière des arguments juridiques fabriqués pour les besoins de la cause (le principe d’inaliénabilité du domaine royal, devenu public, remonte pourtant à l’édit de Moulins de 1566). Pour les partisans de la restitution, il fallait rendre tout ce qui avait été « volé » durant la colonisation, bientôt érigée au rang de crime contre l’humanité ! « Tout doit partir », « liquidation totale » avant fermeture des musées. Interrogé pour nous sur cette polémique entourant la demande du Bénin, le Dr Julien Volper, conservateur au Musée royal de l’Afrique centrale (Tervuren - Belgique), et Maître de conférences au Centre d’anthropologie culturelle de l’université libre de Bruxelles, précise : « Ce qui me choque dans tout le déchaînement de la presse qui a suivi l’affaire des pièces du Dahomey, c’est avant tout l’absence de connaissances historiques, ethnographiques et juridiques qui émerge de la plupart des articles ayant traité du sujet. Je ne prendrai ici qu’un exemple. Le 1er août 2016, le journal Le Monde accordait une tribune au président du CRAN Louis-Georges Tin ayant pour titre “Trésors pillés : la France doit répondre positivement à la demande du Bénin”. Une photo illustre cet article sur le site Internet du Monde et a pour sujet l’une des salles de l’exposition temporaire Bénin cinq siècles d’art royal qui se tint au musée du quai Branly - Jacques Chirac en 2007- 2008. Or, l’ancien royaume de Bénin, sujet de cette exposition, est situé au Nigeria actuel et n’est pas concerné par la demande de l’actuelle République du Bénin qui touche aux objets de l’ancien royaume du Dahomey ! Cette même erreur grossière se retrouve dans un article du journal Le Point daté du 11 novembre 2016 et intitulé : “Faut-il restituer au Bénin ses biens culturels”. »


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