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111 Cette richesse de signifi cations m’a toujours fasciné1. Tout a commencé pour moi il y a cinquante ans lors de mon premier voyage chez les Igbo, à l’est du Nigeria. Au bord d’une route, je fus agréablement surpris de voir une volumineuse sculpture en argile séchée au soleil représentant Ala, la déesse de la terre, entourée de deux enfants et placée à l’avant et au centre d’une maison mbari peuplée d’autres fi gures (fi g. 2). Cette déesse puissante est la mère des autres dieux, des plantes, des animaux et des humains. Source de la moralité et gardienne des traditions igbo, elle est également une génitrice culturelle. Plus tard, lorsque j’ai appris chez certains groupes senufo que la « déesse Mère » nourrissait les hommes avec le « lait de la connaissance » lors de rites initiatiques (fi g. 1), je me suis dit que je devais absolument creuser le sujet. Cet article s’attarde sur plusieurs cultures africaines accordant une place centrale au thème de la maternité, aussi bien d’un point de vue rituel qu’artistique. Les exemples abordés ont été observés dans trois régions distinctes : au sud du Nigeria chez les Igbo, au Soudan occidental chez les Bamana et les Senufo, et dans le bassin du Congo chez les Pende et les Luba. Les images de la mère et l’enfant varient fortement selon les régions, tout comme leurs utilisations et leurs interprétations. Là où elles sont prépondérantes, voire dominantes, l’on constate en outre l’existence de croyances locales reconnaissant le rôle tout aussi déterminant de l’homme pour la création de la vie biologogique et la culture. Autrement dit, on y observe une réciprocité femme-homme équilibrée. Dans certains cas, comme chez les Igbo d’Owerri et les Pende, la femme est nettement dominante2. Dans d’autres, comme chez les membres de l’association bamana du Gwan, la réciprocité homme-femme est reconnue. Mais, même dans ces cas, la primauté ,est donnée à l’entité féminine, probablement parce que sa mission première vise la fertilité et l’augmentation de la population. Quant aux Luba, ils sont les auteurs de fi gures féminines pouvant combiner des COMPLEXITÉ DE LA MATERNITÉ EN AFRIQUE Par Herbert M. Cole FIG. 3 (EN HAUT À GAUCHE) : Mère et enfant senufo. Photo : Herbert M. Cole, 1978 ? FIG. 4 (À GAUCHE) : Ala (Terre) et enfants (détail) dans la mbari dédiée à Obiala à Ndiama Obube Ulakwo, État d’Imo, Nigeria. Photo : Herbert M. Cole, 1966. FIG. 5 (EN HAUT) : Mbari à Nguma, montrant le soleil, la lune et un arcen ciel peints sur le mur, au-dessus de la divinité Mami Wata. Photo : Herbert M. Cole, 1966. FIG. 6 (CI-DESSOUS) : Termitière. Sud du Nigeria. Photo : Herbert M. Cole, 1966. FIG. 7 (À DROITE) : Pilage d’igname. Photo : Herbert M. Cole, 1966.


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