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art extra-européen telles que Paris, mais aussi Berlin, Amsterdam et Bruxelles. De ce fait, et bien que la Suisse n’ait pas possédé de colonies, les collections suisses portent tout de même en elle l’histoire des premiers réseaux de vente et d’achat d’objets d’Afrique et d’Océanie et sont représentatives de la naissance d’un marché de l’art spécifi que. E. T. F. : Effectivement, à l’époque il n’y avait pratiquement pas de marchands d’art extra-européen en Suisse. Cela ne rend que plus frappant encore la réfl exion sur l’altérité soulevée par le mouvement dadaïste, d’abord sur le plan des idées puis rapidement par le biais des objets ! En ce sens, la contribution de ces artistes à l’essor du collectionnisme, même au-delà de la Suisse, a été majeure. Les exemples de Han Coray et de Tristan Tzara le prouvent ! contemporanéité de la création artistique du monde entier. L’Afrique ne devait pas se résumer à une simple note de bas de page ou une simple citation dadaïste. Au lieu de ça, nous avons tenté d’accorder à peu près la même place aux oeuvres dadaïstes et aux oeuvres extraeuropéennes en termes d’images et de texte. T. A. M. : La publication comprend plus de vingt essais d’une quinzaine d’auteurs ayant abordé le sujet depuis l’histoire de l’art, l’ethnologie, le théâtre, la musique, la photographie… Ces perspectives plurielles sont-elles une façon de faire écho à la conception du monde Dada? E. T. F. : La dimension pluridisciplinaire de l’ouvrage a été pour nous le plus grand défi et en même temps une chance énorme pour découvrir de nouveaux aspects du mouvement dada. Son rapport avec les arts extra-européens n’avait pas encore fait l’objet d’études de fonds et les différents angles adoptés par les auteurs du livre ont permis d’élargir l’horizon. R. B. : La pensée « infi nie » – au sens propre du terme–, qui a caractérisé le dadaïsme et a permis l’avènement de formes d’expression absolument innovantes, a guidé notre travail. À l’instar des dadaïstes, nous avons cherché à sortir du cercle établi du savoir et de l’expérience pour nous ouvrir à de nouveaux horizons. Il était fondamental pour nous de susciter l’intérêt du lecteur en multipliant les approches et en diversifi ant les auteurs. Après tout, comme disait Francis Picabia « Notre tête est ronde pour permettre à la pensée de changer de direction » ! M. O. : À ce propos, une précision néanmoins : nous avons tenu dans le livre à explorer également le phénomène inverse, en nous intéressant à la manière dont l’avant-garde artistique a marqué en retour les artistes et intellectuels africains. Il est passionnant de voir comment certaines idées dadaïstes ont été cultivées dans des pays tels que l’Afrique du Sud et transformées en un art s’opposant au régime de l’apartheid. L’article de Roger van Wyk et Kathryn Smith, qui ont pour la première fois écrit sur leur exposition « Dada South », était magnifi que à ce sujet. T. A. M.: Une partie importante des objets africains du livre ont appartenu à l’important collectionneur Suisse Han Coray. Comment était le marché des arts extra-européens à l’époque en Suisse? M. O. : Il existait à l’époque une connexion forte entre Zurich et plusieurs métropoles européennes riches en FIG. 3 (PAGE DE GAUCHE, AU MILIEU) : Pendentif ikhoko. Pende orientaux, RDC. Début du XXe siècle. OEuvre reproduite en cat.5.14, p. 223 de l’ouvrage Dada Africa. FIG. 4 (PAGE DE GAUCHE, À DROITE) : Figure katsina. Hopi, Arizona. vers 1900. OEuvre reproduite en planche K, p. 71 de l’ouvrage Dada Africa. FIG. 5 (À GAUCHE) : Hanna Höch. Sans titre (Aus einem wethnographischen Museum), 1929. OEuvre reproduite en planche D, p. 209 de l’ouvrage Dada Africa. FIG. 6 (CI-DESSOUS) : Double page 146-147 et page 70 de l’ouvrage Dada Africa. Cette dernière page illustre une création de 1925 de Sophie Taueber-Arp s’inspirant d’un costume de katsina hopi, à l’instar de celui de la pièce en fi gure 4 avec laquelle elle dialogue dans l’ouvrage.


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