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STOP • T AAR 121 Si l’ARPA autorise la collecte et le commerce d’objets obtenus sur des terres privées, ce n’est pas le cas pour ceux qui ont été découverts sur des terres fédérales ou indiennes. Étant donné que de nombreux objets d’art amérindien circulent depuis des décennies et que rares sont ceux dont la provenance est attestée, l’inclusion dans la loi STOP des artefacts « obtenus en violation de l’ARPA » aurait engendré un climat d’incertitude, d’autant plus que la loi STOP allongeait la durée de la peine infl igée pour une infraction à l’ARPA ou à la NAGPRA, la faisant passer de cinq à dix ans. La loi STOP comportait une disposition insidieuse accordant l’immunité judiciaire à quiconque rapporterait un objet culturel obtenu illégalement à la tribu indienne ou l’organisation des indigènes d’Hawaï « appropriée » dans les deux ans suivant l’entrée en vigueur de la loi. Outre l’absence de moyens permettant de déterminer ce qui rend un objet illégal, cette amnistie de deux ans exposait toute personne possédant un quelconque objet culturel à des risques sur le plan juridique. La loi STOP était ainsi susceptible d’entraîner la restitution injustifi ée de milliers d’objets détenus en toute légalité, et ce, à des tribus qui n’en voulaient pas. Les partisans de la loi ont suggéré de « demander à la tribu ». Plus de cinq cents tribus sont reconnues par le gouvernement fédéral... Quelle tribu ? Qui au sein de la tribu ? Une telle demande aurait de toute façon été complexe, étant donné que la loi STOP ne prévoyait aucun système d’autorisation, aucun personnel ni fi nancement, aucun critère de classifi cation des objets, aucune norme en matière de preuves, aucun moyen de médiation et aucune voie de recours. Si elle avait été adoptée, la loi STOP aurait sans doute fait peser un sentiment de culpabilité par association sur l’ensemble de l’art amérindien, de la même manière que les nouvelles interdictions fédérales sur l’ivoire d’éléphant ont fait chuter de quarante pour cent les ventes d’artefacts des populations autochtones d’Alaska, pourtant sculptés en toute légalité dans l’ivoire de mammifères marins. Décourager la collection d’objets d’art indien nuirait aux artistes tribaux et à leurs communautés, dont les moyens de subsistance dépendent des ventes de produits d’artisanat et du tourisme, particulièrement dans le Sud- Ouest. Rien qu’au Nouveau-Mexique, les secteurs de l’art et de la culture représentent 1,37 milliard de dollars en traitements et salaires et fournissent près d’un emploi sur dix. En outre, les foires consacrées à l’art amérindien et à l’art tribal attirent plus de cent mille visiteurs par an dans cet État. L’Antique Tribal Art Dealers Association montre la voie en favorisant le dialogue et en créant des systèmes de dons volontaires qui se révéleront plus effi caces que des lois coercitives. De nouvelles lois peuvent faire en sorte que le gouvernement assume la responsabilité des mesures prises par le passé, réponde aux revendications du monde tribal concernant le rapatriement des vestiges ancestraux et garantisse le fi nancement adéquat de la mission des agents chargés du patrimoine culturel et des institutions culturelles autochtones. La loi STOP n’a pas été adoptée en 2016, mais une nouvelle version est déjà à l’étude pour 2017. Les marchands, les collectionneurs et les musées privés ne doivent pas attendre que la loi STOP soit réintroduite. En collaboration avec les populations tribales, ils peuvent s’assurer que le projet de loi ne comportera pas les mêmes lacunes et que toute nouvelle loi répondra aux attentes du monde tribal sans entraîner de graves conséquences économiques et sociales. FIG. 3 : Figure de retable représentant Salomé. Flamande. XVe ou XVIe siècle. Bois. H. : 29,5 cm. Acquise en 2006 dans la boutique d’un libraire de Bruxelles. Collection privée. Formée de plusieurs communautés et parlements régionaux, la Belgique possède des lois incroyablement complexes en matière de propriété culturelle, dont certaines ont été adoptées au lendemain des guerres napoléoniennes. Par ailleurs, la Belgique a tardé à ratifi er la convention de l’Unesco de 1970 sur la protection de la propriété culturelle, qu’elle n’a signée qu’en 2009. Si la loi TAAR avait été votée, la détention de cet objet aux États-Unis aurait pu être remise en cause, en vertu d’une quelconque loi belge strictement régionale ou nationale, indépendamment de sa date d’entrée en vigueur.


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