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119 FIG. 1 : Masque. Makonde, Tanzanie / Mozambique. XVIIIe siècle. Bois, fi bre et pigments. H. : 22,9 cm. Collecté au Tanganyika (Afrique de l’Est allemande) avant 1906 par le capitaine H. Fonck de Carlshafen, Allemagne ; acquis par le Linden-Museum, Stuttgart, le 18 mars 1906 (inv. 43744) ; retiré de la collection le 3 janvier 1936, pour échange légal avec le Dr Hillenbrand, Pforzheim, Allemagne ; galerie Wolfgang Ketterer München, Munich, 95 Auktion, 6 décembre 1985, lot 246 ; collection privée, Allemagne ; Pace Primitive, New York, 2002. Collection privée. Ce masque, dont la date de collecte exceptionnellement ancienne est attestée par les archives du Linden-Museum, est originaire de l’Afrique de l’Est allemande, qui comprenait une grande partie de l’actuelle Tanzanie, même si les Makonde qui l’ont fabriqué peuplent également le Mozambique voisin (à l’époque, l’Afrique de l’Est portugaise) et se sont déplacés librement sur leur propre territoire jusqu’aux années 1920. Par conséquent, le lieu d’origine exact de ce masque est incertain. Si cet objet était tombé sous le coup de la loi TAAR, il aurait été relativement diffi cile de déterminer quelles lois sur la propriété culturelle auraient été appliquées – celles de l’Allemagne, de la Tanzanie, du Portugal ou du Mozambique. Il convient par ailleurs de souligner que le point de vue des Makonde eux-mêmes, qui demeurent un groupe culturel actif, n’a aucune valeur aux yeux du Département d’État des États-Unis, qui entretient avec eux exclusivement des relations intergouvernementales. LE « TERRORISM ART AND ANTIQUITY REVENUE PREVENTION ACT » DE 2016 (TAAR ACT) La loi TAAR Act de 2016 (S. 3449) fut une tentative déguisée de modifi er la politique américaine en matière d’accès du public à l’art et aux artefacts culturels du monde entier. Maquillée en loi destinée à lutter contre le fi nancement du terrorisme, elle était supposée mettre fi n aux importations et criminaliser le commerce d’artefacts en provenance deux territoires meurtris : la Syrie et l’Irak. Tout cela n’était que pure illusion. Des mois avant qu’elle ne soit proposée, le président Obama avait signé et mis en oeuvre une loi bloquant les importations d’objets syriens et irakiens. Malgré la récompense de cinq millions de dollars promise depuis septembre 2015 en échange d’informations attestant de liens entre le commerce de l’art aux États-Unis et le terrorisme, aucun cas n’a été rapporté. En réalité, sous couvert de ces dispositions, la loi TAAR poursuivait un objectif plus global qui allait redéfi nir le terme « volé » appliqué aux biens culturels. Les « biens volés » comprendraient dès lors tout bien culturel importé d’un pays étranger en violation d’une quelconque loi étrangère. En calquant la politique culturelle américaine sur le contenu de lois étrangères, la loi TAAR aurait mis fi n à une politique publique en vigueur depuis l’époque où les fondateurs de la nation ont pour la première fois encouragé la collection de livres, de spécimens scientifi ques, d’oeuvres d’art et d’objets décoratifs provenant de l’étranger dans le but de forger des liens culturels et d’enrichir la vie culturelle des États-Unis. Durant ces quarante dernières années, les tribunaux américains ont interprété le National Stolen Property Act, une disposition pénale, afi n de rendre illicites la possession, la vente et le transport d’artefacts d’une valeur supérieure à cinq mille dollars considérés comme « volés » en vertu de l’existence et l’application de lois étrangères sur le « patrimoine national ». Une loi relative au « patrimoine national » ou à la « propriété nationale » confère au pays étranger un droit de propriété sur tous les artefacts, connus ou inconnus. Aux yeux des tribunaux américains, les objets provenant de pays qui appliquent ces lois de propriété peuvent être considérés comme « volés », indépendamment de la manière dont ils ont été acquis dès lors qu’ils sont importés du pays après la date d’entrée en vigueur de la loi étrangère. La plupart des lois touchant à la propriété nationale sont entrées en vigueur au cours de ces quinze à trente dernières années. La loi TAAR visait à éliminer toute exigence voulant qu’un pays étranger applique ses propres lois sur les biens culturels sur son territoire et aurait


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