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DOSSIER 98 FIG. 12 (À GAUCHE) : Marotte kébé-kébé portant une coiffe de chef (style III). Kuyu, Congo. Village d’Olombo, 1984. Archives de l’auteur. FIG. 13 (PAGE SUIVANTE, À GAUCHE) : Vue de l’exposition coloniale de 1931 à Paris. Photographie de M. Cloche extraite de 60 aspects de l’Exposition Coloniale, Arts et Métiers Graphiques, 1931. Face au Pavillon de l’Afrique équatoriale française se tiennent trois poteaux. Celui du milieu est surmonté d’une statuette bembé tandis que les deux autres présentent des têtes kébé-kébé. Charles Ratton, à l’oeil mondialement réputé29. Courtois prend sa retraite en 1938 et vend alors presque exclusivement à ces marchands-collectionneurs. Charles Ratton aurait acheté en premier mais dans la limite des prix qu’il s’était fi xés. Ainsi Pierre Vérité a pu obtenir de très belles pièces en y mettant le prix30. La Seconde Guerre mondiale n’interrompt pas les affaires avec Charles Ratton, puisqu’on retrouve trace de nombreuses transactions jusqu’en 1943. À partir de cette année, Courtois ne vend plus qu’à Vérité, probablement parce que sa femme, Madeleine (ex-Meunier), l’avait quitté pour épouser Charles Ratton. Grâce à leur monopole des styles I et II, les deux antiquaires ont pu adopter la même politique, à savoir préserver ce que le public n’était pas prêt à apprécier à sa juste valeur. S’abstenant donc de mettre en vente prématurément ou de trop publier dans les « albums », ils se sont limités aux transactions discrètes avec quelques collectionneurs d’élite, comme le baron von der Heydt qui fi t don en 1952 au Museum Rietberg de sa collection de mille six cents pièces d’Afrique, d’Asie et d’Océanie, parmi lesquelles l’oeuvre en fi gure 4 ou encore Joseph Mueller (fi g. 30). Citons aussi Madeleine Rousseau (fi g. 16) et Helena Rubinstein... De son côté, le British Museum acquiert en 1947 une statuette du style I ainsi qu’une tête du style II venant de Margaret Webster Plass (fi g. 18)31 En 1949, il achète une tête triple de style I à Fred Uhlman32, que ce dernier tenait de Pierre Vérité. Toutes ces FIG. 11a-b-c (CI-DESSOUS) : Schéma illustrant les trois modèles utilisés pour le rendu des dents dans la sculpture kuyu. © Tribal Art magazine. LE DEVENIR DES OBJETS De la collecte à la Seconde Guerre mondiale… À l’Exposition coloniale internationale de Paris de 1931, le public européen a pu « admirer » au pavillon de l’Afrique équatoriale française des poteaux en bois peint surmontés de têtes de kébékébé – montage qui n’a jamais existé chez les Kuyu (fi g. 13) – ainsi que des têtes emmanchées, sculptées pour l’occasion. De même en 1937, le ministère des Colonies a commandé des kébé-kébé pour l’Exposition universelle. En l’espace d’un demi-siècle, une cinquantaine d’objets kuyu et mbochi ont abouti dans les musées européens par le biais de collectes et d’achats, mais aussi de dons de particuliers. À cette même période émergent des fi gures de marchands dont le rôle va s’avérer crucial dans le devenir des objets kuyu. S’il a vendu des objets du style III, au fur et à mesure qu’il recevait de nombreux lots du Moyen-Congo - dont probablement la sculpture représentant la divinité Ebongo, donnée par Émile Chambon au MEG (fi g. 14) - Pierre Vérité a surtout joué un rôle crucial dans le devenir des styles I et II, méconnus. Et cela en relation avec deux autres acteurs : l’administrateur Aristide Courtois (fi g. 15), dont on sait qu’il a rapporté la quasi-totalité de ces styles, et un autre galeriste, distinguer parmi les kébé-kébé lesquels sont encore en phase avec la tradition et lesquels en sont plus ou moins démarqués, s’ajoute l’interpénétration des cultures Kuyu et Mbochi. Si les conditions de la collecte ont été particulières, le devenir des objets rapportés dans les circuits marchands ne l’a pas moins été. Sauf exception, les musées et les collectionneurs n’ont longtemps connu que le style III. Les objets des styles I et II rapportés pour la plupart par A. Courtois sont restés en réserve, voire sciemment cachés dans l’attente du moment opportun pour les dévoiler.


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