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106 Parmi les collections privées d’art africain rassemblées au début du XXe siècle en Europe et aux États-Unis, celle du collectionneur danois Carl Kjersmeier fut l’une des plus remarquables. Aujourd’hui, Kjersmeier est surtout connu pour son oeuvre en quatre volumes réalisée entre 1935 et 1938 – Centres de style de la sculpture nègre africaine – proposant une catégorisation de la production artistique étudiée suivant des critères géographiques et culturels, et une description des objet reproduits. Le nom de Kjersmeier est également associé à la provenance d’un appui-tête lubashankadi à double caryatide attribué au Maître de la coiffure en cascade, désormais l’un des joyaux de la collection du Nationalmuséet de Copenhague1. Kjersmeier fut également l’un des premiers collectionneurs à collaborer avec Man Ray, qui immortalisa certaines de ses pièces (fi g. 7)2. Ce dont on se rappelle moins, en revanche, c’est du fait que Carl et Amalie Kjersmeier furent à l’origine d’une exposition de leur collection africaine au Nationalmuséet qui présentait, entre autres objets, vingt-trois cimiers de danse sogoni-koun bamana, variantes des cimiers de danse chi wara plus connus. À l’exception d’un spécimen, les cimiers exposés étaient issus de l’ensemble de cinquante-six exemplaires que le couple Kjersmeier collecta en Afrique occidentale, sur le territoire sous domination française, entre 1931 et 1932. Bien que la personnalité de Kjersmeier ait déjà été évoquée dans ce magazine par le passé3, cet article apporte un éclairage nouveau sur l’homme et sa collection, grâce à un travail de fond sur le corpus de cimiers sogoni-koun, dont la plupart des exemplaires identifi és et localisés sont reproduits ici. LES KJERSMEIER ET LEUR COLLECTION Carl Ludvig William Römer Nutzhorn Kjersmeier est né en 1889 dans la ville danoise de Vejle, où vivaient ses parents et où son père était directeur de prison. Il doit son nom à son parrain, préfet et pasteur danois. La famille Kjersmeier occupait un bâtiment annexé à la prison et les détenus aidaient de temps à autre la mère de Carl dans la cuisine. Son enseignement primaire achevé, Kjersmeier s’installa à Copenhague. Il y effectua des études universitaires de droit, qu’il acheva en 1915. D’après les registres de la police (politiets registerblade), il vivait en 1906 au premier étage d’un immeuble situé au 1, Svendsgade à Copenhague, apparemment DOSSIER Carl Kjersmeier et les Sogoni-koun Une vie, un voyage et une passion voués aux arts d’Afrique Par Thomas Otte Stensager FIG. 1 (À GAUCHE) : Carl et Amalie Kjersmeier dans leur pièce de séjour, admirant une pièce bamana qu’ils collectèrent à Sulubua. Extrait de Centres de style, pl. 2. En arrière-plan fi gure le meuble reproduit en fi gure 3. Le cimier de danse qui se dresse à gauche a été identifi é dans les collections du Nationalmuséet de Copenhague (inv. G8047). FIG. 2 (CI-DESSOUS) : Amalie Kjersmeier chez elle parmi la collection d’art africain du couple. Les textiles du Kasaï qu’elle affectionnait se trouvent accrochés au mur, derrière les rayonnage de la bibliothèque. Septembre 1930. Photo : collection privée.


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