Page 71

T83F

DU JOURDAIN AU CONGO 69 Fig. 8 : Poignard issu d’un tibia. Région du golfe de Papouasie. L. : 36 cm. Horniman Museum, Londres. Dessin de gauche tiré de la description de la collection Biro (1899). Sur le rare poignard fi gurant au centre de l’image, la grande protubérance latérale de l’articulation du tibia constitue la partie la plus importante de l’extrémité supérieure. Des trous ont été perforés le long du bord afi n d’attacher des touffes de fi bres végétales. et la force du Saint-Esprit, et donnent naissance à une production picturale très originale dont le pasteur et peintre Pierre Bodo est l’un des plus grands représentants (fi g. 5 et 6). T. A. M. : Il ressort de vos propos que l’infl uence du christianisme se ressent principalement dans les thèmes iconographiques et dans l’adoption de certaines typologies d’objets, comme les crucifi x, mais que reste-t-il d’éminemment kongo dans ces productions ? J. V. : Énormément de choses ! L’âme kongo se ressent dans beaucoup de pièces exposées. Prenons, par exemple, les nkangi kiditu : on peut certes parler d’un art hybride, mais ils restent kongo à bien des égards, aussi bien par leurs caractéristiques stylistiques que par leurs contextes d’utilisation qu’il est souvent diffi cile de rattacher franchement à une pratique religieuse occidentale ! Pour moi, la vraie interrogation serait en réalité de savoir ce qu’il reste d’européen dans cet art chrétien d’Afrique centrale : un motif ? L’origine d’un nom ? Un renvoi à un niveau rituel ? Chaque cas mérite une attention particulière. T. A. M. : Existe-t-il des sources iconographiques ou des modèles avérés dont les artistes kongo se seraient inspirés ? J. V. : On sait par le biais des sources anciennes, lesquelles furent notamment rendues accessibles à de nombreux chercheurs par les travaux pionniers de Louis Jadin, que des livres et des objets de facture européenne – des sculptures de saints, des peintures – ont fait partie des cargaisons de certains bateaux ayant mis le cap vers les royaumes de Kongo et d’Angola. Plusieurs de ces oeuvres réalisées en Europe ou au Brésil, vieilles de plusieurs siècles, étaient d’ailleurs toujours conservées en Angola au XXe siècle. On peut évoquer, à titre d’exemple, une sculpture de la Vierge datée du XVIIe siècle des collections muséales angolaises qui fut publiée dans un ouvrage paru en 1950 à Luanda, ou bien une sculpture de saint Antoine tenant une épée datée de la même période qui était localisée, en 1960, dans l’église Nossa Senhora da Conceiçao de Muxima. Ces deux pièces sont publiées dans le catalogue de l’exposition... Mais revenons à la question : peut-on dire que certains objets kongo sont inspirés de modèles


T83F
To see the actual publication please follow the link above