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109 céramiques à goulots multiples (fi g. 35). Leur usage précis n’est pas très clair, mais on sait que des chefs luba possédaient des pots à deux goulots et que des pots à triple cols étaient utilisés dans le cadre de libations aux ancêtres (Huffman 1992 : 70). Certains documents photographiques du MRAC présentant des céramiques de ce type de la région lacustre du Kisale renforcent ce lien avec le monde des morts. En effet, selon la légende d’origine de la fi gure 34, l’un des goulots était utilisé par le brasseur, un deuxième était réservé au chef… et le troisième était destiné au défunt. Au nord-est de la RDC, chez les Alur et les Lendu, il existait également des céramiques à deux ou quatre goulots connues sous le nom de kurugu qui jouaient un rôle dans les cultes liés aux naissances de jumeaux (fi g. 36). Enfi n, précisons que nous retrouvons ces terres cuites atypiques dans des pays frontaliers de la RDC. Ainsi, la pièce de la fi gure 37 est connue sous le nom de minwibiri (« deux bouches ») et était la propriété des devins burundais. Le minwibiri était surtout utilisé pour consacrer la bière bue par les devins, notamment à l’occasion de la cérémonie initiatique kubandwa. Les minwibiri n’étaient d’ailleurs pas les seules céramiques utilisées lors de ce rite. L’imposante jarre cerclée de feuilles de la cucurbitacée umutanga (Lagenaria rufa) visible sur la photo de la fi gure 38 peut être considérée comme le pot principal du kubandwa. Appelée Impângé ou rwambaramitanga (« le Grand qui porte les plantes ») cette poterie jouait le rôle de récipient FIG. 27 (PAGE DE GAUCHE) : « Pot pirogue » naengo. Makere, RDC. 27 x 31 cm. Collecté au début des années 1910 par A. Hutererau. MRAC, n° inv. EO.0.0.6001. FIG. 28 (À GAUCHE) : Cruche aba. Madi, RDC. 25 x 15,6 cm. Collecté au début des années 1910 par A. Hutererau. MRAC, n° inv. EO.0.0.11082. pour les dizaines de litres de bière de banane urwagwa consommés par les participants à l’initiation. Sa couronne foliacée n’est en aucun cas décorative mais visait à rendre le pot effi cace rituellement (Celis et Nzikobanyanka 1984 : 532-534). NOTES 1. Les décorations très particulières des « marbrées » étaient obtenues après la deuxième cuisson de la céramique. On projetait alors sur les pièces encore brûlantes une décoction à base d’écorces d’une euphorbiacée ou d’une anacardiacée locale (Pinçon et Ngoïe-Ngalla 1990 : 167). La réaction chimique résultant du contact entre la mixture et le pot donnait naissance aux motifs. FIG. 29 (CI-DESSUS) : Récipient à bière kede. Bangba, RDC. 47 x 32 cm. Collecté au début des années 1910 par A. Hutererau. MRAC, n° inv. EO.0.0.11799. FIG. 30 (CI-DESSOUS) : Récipient sango. Mongelima, RDC. 20 x 14 cm. Collecté avant 1911, don de C. Delhaise. MRAC, n° inv. EO.0.0.2998-3.


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