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PORTFOLIO très précises de forme et même de stratégie. Dans une lettre à Guillaume, Apollinaire écrira : « Comme je signe la préface, il vaut mieux que mon nom ne fi gure pas parmi les collectionneurs »14. La préface qu’il signe synthétise son engagement pour le rayonnement des arts nègres. L’auteur d’Alcools y reprend des thèmes développés dans ses articles – et particulièrement dans celui d’avril 1917 paru au Mercure 156 de France « Mélanophilie et mélanomanie » – insistant sur la nécessité de franchir un pas de plus dans la reconnaissance de ces arts et de promouvoir la recherche. Aussi écrit-il : « Depuis quelques années des artistes, des NOTES 1. Guillaume Apollinaire, « Zone », poème extrait d’Alcools, Paris, Mercure de France, 1913. 2. Les Arts à Paris n°3 décembre 1918 p. 2-4. 3. Guillaume Apollinaire. Chroniques d’art 1902-1918. Paris, Gallimard, 1960, p. 82. 4. Journal du Soir, 3 octobre 1909. 5. Art News, 27 octobre 1934. 6. C’est ainsi, par exemple, qu’il rencontre Picabia, Picasso, De Chirico… Il saura en tirer le meilleur parti : « J’apprends par Monsieur Apollinaire que vous vous intéressez à mes statues nègres. J’en ai 6 sous la main… » écrira-t-il, par exemple, à Picasso (Archives musée Picasso). 7. Paris-Journal, 12 septembre 1912, Archives Paul Guillaume, Fonds Alain Bouret, Musée de l’Orangerie DOCOR 2011.0.63 (B0 006 Pr). 8. Les Mémoires du Baron Mollet, Paris, Gallimard, 1963 p. 94. 9. Marius de Zayas, How, When and Why Modern Art Came to New York : edited by Francis M. Naumann. Cambridge, The MIT Press, 1996. p. 55 : “Through Picabia, I met Apollinaire and Max Jacob, and through Apollinaire I met Paul Guillaume...” 10. Marius de Zayas, op. cit.p. 164: “I remarked more than ever the infl uence of african negro art among this revolutionists … I am convinced one more of the necessity to have a show in the S. of the negro art”. Naumann précise que le S fait allusion à la Photo Secession, le nom de la galerie de Stieglitz. 11. Ce sujet fut abordé dans le hors-série nº3 de Tribal Art magazine consacré à l’exposition African Art, New York and the Avant-Garde (Metropolitan Museum of Art, 27 novembre 2012 – 14 avril 2013). Sous le commissariat de Yaëlle Biro, cet événement s’inspirait de la thèse de doctorat que cette dernière soutint à Paris en 2010 : Transformation de l’objet ethnographique africain en objet d’art. Circulation, commerce et diffusion des oeuvres africaines en Europe Occidentale et aux États-Unis, des années 1900 aux années 1920. 12. Deux lettres, l’une du 15 septembre 1915 et l’autre du 8 octobre 1916 sont particulièrement révélatrices de cela. Ces deux documents sont conservés au musée de l’Orangerie, respectivement sous les numéros d’inventaire DOCOR 2011.0.63 D.0.050. Ms et D.0.072.Ms. 13 SIC n°14 février 1917. SIC est une revue littéraire amateurs d’art, des musées, ont cru pouvoir s’intéresser aux idoles de l’Afrique et de l’Océanie, au point de vue purement artistique (…). Mais aucun appareil critique n’est encore à la disposition de cette nouvelle curiosité (...). Il faudra longtemps se contenter de n’éprouver vis-à-vis des idoles nègres que des sensations esthétiques et d’évocation poétique (…). Les critiques européens pourront-ils ajouter, un jour une analyse méthodique des styles… ». Faisant écho aux demandes d’étude d’Apollinaire, Guillaume présente dans le même opus un exposé tentant des défi nitions et classifi cations. Des informations quant à la provenance des oeuvres reproduites et à leur contexte d’utilisation sont également données en légende, distinguant ainsi ce volume d’une autre publication emblématique parue à peine deux ans plus tôt, le célèbre Negerplastik de Carl Einstein, dont les illustrations ne sont pas renseignées5. La mort d’Apollinaire survenue en novembre 1918, ces Sculptures Nègres resteront la dernière grande oeuvre fruit de la collaboration et de la complicité des « deux Guillaumes » ; un héritage à la hauteur de l’engagement pour la connaissance et la reconnaissance des ces arts nouvellement découverts et mal appréciés que tous deux ont manifesté – avec cohérence et opiniâtreté, conjointement et individuellement16 – tout au long de leur vie à travers ouvrages, articles, expositions et spectacles. Pl. XIV. (Voir fi g. 6). Pl. XV. Collection Paul Guillaume. DIVINITE « DZEMBE » DETAIL. Pl. XVI. MASQUE BAMBARA (Côte d’Ivoire). Pl. XVII. Collection Paul Guillaume. STATUE CYNOCEPHALE (Gabon). Grand-Esprit tutélaire des Pahouins. La contemplation en est exceptionnellement autorisée aux femmes. Pl. XVIII. (Voir fi g. 7).


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