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Art mbembé au MET 97 sanctuaire au-delà des limites du village, dans la brousse (Harris 1984 : 61). Leur popularité changeait constamment afin de permettre l’adoption de nouveaux groupes (Harris 1965 : 12). L’Eberambit, l’association des guerriers de premier plan, comptait parmi les plus influentes. Non seulement le droit d’entrée était payant, mais il fallait également amener la preuve d’une prouesse guerrière, à savoir présenter la tête d’un ennemi (Harris 1984 : 62). Lors de son dernier contact avec O. Traoré, Hélène Leloup obtint des informations sur les traditions orales relatives à trois des figures masculines (deux debout et une assise). Ces comptes rendus suggèrent que ces oeuvres, débordant de vitalité, auraient été des portraits commémorant le courage de chefs spécifiques. L’imposante figure masculine debout tenant dans la main gauche une tête-trophée plus grande que sa propre tête a été identifiée comme étant Appia, grand chef et fondateur du village portant son nom (Appia Koun), à l’âge de soixante-sept ans (fig. 8). La figure est supposée avoir été sculptée dix-sept ans avant sa mort en 1613. Les dents apparentes et serrées de cette figure, son torse carré extrêmement large et ses fesses musclées et arrondies se conjuguent à la surface lézardée du grain du bois pour représenter un personnage incroyablement puissant et brutal. Une impressionnante figure assise, semblable sur le plan formel, a les genoux pliés et porte une tête-trophée encore plus grande sur son côté gauche, tandis qu’elle lève les yeux et regarde au loin (fig. 9). Son torse est plus étroit au sommet et prend une forme arrondie au niveau du ventre. L’homme qu’elle représente est censé être le fondateur du village de Mabana au XVIe siècle, connu pour sa bravoure exemplaire, qu’il insufflait aux guerriers qu’il formait. Étant donné que la datation au carbone 14 de l’oeuvre en question indique 1785 +/- 35, relier cette oeuvre à cette tradition orale constitue au mieux une approximation. Toujours selon la tradition orale, Mabana souhaitait que sa renommée s’étende en amenant son travail à Abubra, la ville principale de son peuple. Là, des sacrifices eurent lieu pour rendre grâce après des batailles victorieuses. Une figure debout – le torse svelte et contracté, les bras le long du corps, à présent dépourvue d’avant-bras et de mains et à qui il manquait également la tête –, a été associée au chef N’Ko (fig. 10). Celui-ci explique l’absence de la tête dans une déclaration faite aux notables de N’Koum avant sa mort : « Je sais qu’après notre mort, nos arrière-petits-enfants vivront dans de meilleures conditions que les nôtres ; mais afin de leur rappeler que c’est à nous qu’ils doivent cette sérénité, nous qui avons combattu pour leur liberté, je demande que la tête de ma sculpture soit coupée et enterrée avec moi. Ceci leur rappellera que de nombreuses têtes ont été coupées FIG. 11 : Groupe de maternité : mère assise et enfant. Mbembé, Région du fleuve Ewayon, Province de la Cross River, Nigeria. XVIIe – XVIIIe siècles. Bois. H. : 88,5 cm. Collection privée. © BAMW Photography. FIG. 12 : Groupe de maternité : mère et enfant. Mbembé, Région du fleuve Ewayon, Province de la Cross River, Nigeria. XVIIe – XVIIIe siècles. Bois, pigment, résine et ongles. H. : 108 cm. The Metropolitan Museum of Art, New York, Achat, 2010 and 2008 Benefit Funds, Laura G. et James J. Ross, David et Holly Ross, Noah-Sadie K. Wachtel Foundation Inc. et Mme Howard J. Barnet Gifts, 2010 (2010.256). © The Photograph Studio, Metropolitan Museum of Art, NY.


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