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MUSÉE à la une L'éclat des ombres 74 L'ART EN NOIR ET BLANC DES ÎLES SALOMON Par Magali Mélandri « Chaque grande pirogue contenait de vingt-cinq à trente hommes. Elles avaient la forme que j'ai déjà décrite, avec les pointes des deux extrémités hautes de dix pieds, formant ainsi un bouclier contre des flèches, dans la marche en avant et dans la retraite. Toutes étaient en bois léger, avec des bordures de nacre et des panaches d'herbe de couleur, des guirlandes, des rameaux de pin rouge et blanc. À la proue était une tête de bois grimaçante, destinée à effrayer tout ce qui pouvait embarrasser la route. La plupart des pirogues sont si étroites que l'on ne peut s'y asseoir deux de front et que les rameurs sont placés en pointe. Les natifs manoeuvraient leurs pagaies en cadence. Ils les ramenaient après chaque palade contre les bordages qu'ils frappaient tous ensemble suivant un certain rythme. C'est ainsi qu'on rame quand on part pour la chasse aux têtes. La nage est scandée de façon différente suivant les circonstances, obsèques, fêtes et autres cérémonies. Nous allions à une allure de dix noeuds à l'heure, et c'était un beau spectacle que celui de toutes ces pirogues à la courbe si gracieuse et au svelte profil qui fendaient la mer écumeuse. Elles bondissaient et se cabraient, la proue dressée hors de l'eau, semblables à une galopade de jeunes cavales dans la plaine, et secouaient au vent leurs panaches comme des FIG. 1 a-c : Figure de proue. Îles Salomon occidentales. XIXe siècle. Bois et nacre. H. : 20 cm. Musée du quai Branly, Paris, 71.1887.67.7. © musée du quai Branly, photo : Claude Germain. FIG. 3 (PAGE SUIVANTE) : Bouclier. Île de Santa Isabel. XIXe siècle. Écorce, nacre, bambou et résine. H. : 87,5 cm. Musée du quai Branly, Paris, 70.2003.4.1. © musée du quai Branly, photo : Patrick Gries.


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