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PORTFOLIO Stephen Thompson et le British Museum 144 Par Pamela Glasson Roberts Légendes Jonathan Fogel Avant le projet pour le British Museum, Thompson avait réalisé quelque trois cents photos de plus de mille objets pour le catalogue en trois volumes Masterpieces of Industrial Art and Sculpture at the International Exhibition dans le cadre de l’exposition de 1862 au South Kensington Museum (rebaptisé plus tard Victoria and Albert Museum). Il y photographia à peu près tout : bijoux, cabinets d’ébène, épées, statues, horloges, dentelle, verre et céramique, souvent dans des conditions de luminosité difficiles. Les méthodes mises au point par Thompson pour atténuer les difficultés techniques de ce projet – soit exploiter du mieux possible chaque rayon furtif de lumière en prenant la photo par en dessous ou selon des angles inattendus afin de montrer des détails intéressants dans les zones d’ombre – se sont révélées être une excellente préparation au projet qu’il allait mener au British Museum. De 1869 à 1872, Thompson photographia, sans avoir recours à la lumière artificielle, environ cinq mille objets pour aboutir à un peu moins de mille négatifs. On se demande encore aujourd’hui à qui, de Thompson ou de son commanditaire Harrison, l’on doit que ce projet ait pris une telle ampleur. L’ouvrage qui en résulta – British Museum Collections: Photographed by Stephen Thompson, with a Comprehensive Catalogue of the Objects Depicted and an Introduction by Charles Harrison – fut publié le 15 juillet 1872 par W. A. Mansell & Co (2, Percy Street à Londres). Il se composait de sept volumes contenant neuf cent vingt-neuf photos à l’albumine (d’autres furent ajoutées ultérieurement), mesurant chacune 30 x 25 cm. Le premier volume de cette série s’intéressant à l’ensemble des collections du musée contient les plaques 1 à 157 et s’intitule Pre-Historic, Ethnographical and Christy Collection. Le matériel qui s’y trouve avait été sélectionné et catalogué par A. W. Franks, conservateur des antiquités britanniques et médiévales et du département d’ethnographie. Franks avait été admis à l’Ethnological Society en 1869, d’où le fait que ce domaine confidentiel à l’époque occupait une place si importante dans la série. Les clichés d’objets d’Afrique, du Pacifique et des Amériques de Thompson constituent les photos ethnographiques de pièces muséales les plus anciennes de Grande-Bretagne. Elles présentent des ustensiles, des ornements et des outils de Lorsqu’il vit le jour en 1759, le British Museum constituait une innovation. Musée national et non pas institution aux mains de la noblesse ou de l’Église, il était ouvert gratuitement à « toutes les personnes studieuses et curieuses ». La collection d’origine, qui était celle du médecin et naturaliste Sir Hans Sloane, comprenait à la fois des antiquités et des objets ethnographiques. Dès le départ, le musée s’est consacré à la divulgation sur l’art, la culture et l’histoire. C’est dans ce contexte que le photographe Stephen Thompson (1830–1892) fut engagé en 1869 pour prendre des photos des « diverses antiquités et pièces de monnaie » du musée à des fins éducatives. Auparavant, entre 1853 et 1859, le musée avait fait appel à un photographe interne, Roger Fenton (1819–69), afin de constituer une documentation visuelle des collections. Fenton avait produit plus de huit mille négatifs durant les deux premières années de sa mission. Le musée put alors cataloguer, classer, promouvoir tout ces tirages de ses collections grandissantes que, par ailleurs, il espérait même vendre avec un peu de chance. La mission de Fenton prit fin en 1859 : son coût s’était avéré trop élevé et la vente des photos n’avait pas répondu aux attentes. Eu égard à cet échec, le musée était visiblement réticent à réinvestir financièrement dans la photographie (il ne désigna aucun photographe officiel avant 1927). Fort heureusement, ces réserves n’étaient pas partagées par certains investisseurs privés, dont Charles Harrison, avocat et archéologue amateur accompli, qui demanda le premier au musée d’autoriser Thompson à y prendre des photos. En décembre 1869, ce dernier entama son travail. Durant trente années dédiées à la photographie, Thompson a produit une quantité impressionnante de matériel. Doué aussi bien pour la photo de paysages que d’architecture ou d’objets d’art, il est l’auteur d’images parues dans plus de trente ouvrages et portfolios. De 1861 à 1864, une grande partie de ses travaux a été présentée dans les expositions photographiques annuelles de la Royal Photographic Society. Malgré sa prolifique carrière, il a déclaré faillite à deux reprises – en 1866 et 1877 – et a lutté contre des problèmes de santé, vraisemblablement exacerbés par les substances toxiques utilisées en chambre noire. FIG. 1 : Couverture du premier volume de la série British Museum Collections: Photographed by Stephen Thompson, with a Comprehensive Catalogue of the Objects Depicted and an Introduction by Charles Harrison, W. A. Mansell & Co, Londres, 1872. FIG. 2 : Planche 48 : Coupe en ivoire avec couvercle et corne sculptées en Afrique de l’ouest, probablement sous l’influence des Portugais, date, XVIe siècle ; et fragment d’une défense d’éléphant taillée récemment par des indigènes du Loango. —Coll. Christy. De gauche à droite Défense d’éléphant. Loango, R. D. Congo. Avant 1868. Don de Bryce M. Wright, 1868. Af.4821. Salière en ivoire. Sapi, Sierra Leone. 1490–1530. Don de Sir Augustus Wollaston Franks, 1869. Af.5117.a&b. Corne de chasse. Sapi, Sierra Leone. 1490–1530. Don de Sir Augustus Wollaston Franks, 1870. Af.7009. Pour toutes les images : collection Patrick, Philippe, Thierry Challande, Genève. Scans : Nicolas Lieber. Remerciements à Michael Evans Tribal Art, Dijon.


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