Page 130

Layout1

DOSSIER plus fin. Sur de nombreuses défenses, les représentations sont dessinées de manière sélective avec un colorant noir. Seuls les vêtements, les cheveux, les yeux et les toisons des animaux sont accentués avec des motifs simples, se limitant généralement à quelques traits de base : pour l’habillement, une ligne, un carreau et un double cercle. Pour les toisons animales, les coiffures humaines et les pupilles, il s’agit souvent de petits trous peu profonds que l’on tamponne de colorant également noir. Nous ne connaissons pas non plus le nombre de sculpteurs 128 d’ivoire et d’ateliers établis le long des côtes du Loango. Un témoin oculaire qui a visité la côte entre 1885 et 1888 affirmait qu’il n’y aurait eu que quatorze sculpteurs d’ivoire actifs au Loango et qu’ils protégeaient leur catégorie professionnelle par une espèce de syndicat intervenant pour un nombre limité de membres (Bridges, 2009 : 42). Lorsque nous analysons l’organisation de la production artistique en Afrique, il y a de fortes chances pour que les ivoires du Loango aient été sculptés dans un atelier où collaboraient plusieurs artistes. Bridges a constaté, après avoir comparé quelque deux cents défenses partout dans le monde, un style de sculpture identique dans quelques cas, ce qui suggèrerait que les oeuvres concernées pourraient être dues à la main d’un seul et même artiste. Cette analyse comparative permet de dégager des correspondances encore plus significatives dans les choix des thèmes sculptés. Celles-ci renforcent l’idée de l’existence d’ateliers où les artistes pouvaient créer dans un climat d’émulation. Une comparaison des défenses nous apprend qu’outre les maîtres-sculpteurs, il y avait aussi des artisans moins talentueux. Cette grande diversité au niveau de la qualité peut témoigner du fait que des sculpteurs travaillant seuls prenaient part au marché pour surfer sur la vague de la popularité des ivoires de Loango auprès des Européens. Au terme de cette analyse, nous espérons que l’intérêt des ivoires du Loango – dont les collections muséales néerlandaises abritent de nombreux exemplaires – n’est plus à démontrer. Témoignage d’un art de contact, il s’impose comme une production artistique mûre, d’une richesse iconographique et d’une qualité d’exécution incontestables même s’il existe de nombreuses zones d’ombre en ce qui concerne les circonstances de leur création, ainsi que leur signification. Espérons que ces questions serviront de base à des recherches ultérieures. BIBLIOGRAPHIE Bassani, Ezio et Fagg, William (1988), Africa and the Renaissance: Art in Ivory. New York, Center For African Art. Bastian, Adolf (1874), Die deutsche Expedition an der Loango- Küste, nebst älteren Nachrichten über die zu erforschenden Länder. Erster Band. Jena, Hermann Costenoble. Bridges, Nichole N. (2009), Contact, Commentary, and Kongo Memory: Souvenir Ivories from Africa’s Loango Coast. thèse de doctorat, University of Wisconsin-Madison. Faber, Paul et Wijs, Sonja dans Daan van Dartel (2011), Africa at the Tropenmuseum. Amsterdam, KIT Publishers. Feith, Jan (1910), « Het verhaal van den Afrika-Reiziger. Zijnde de geschiedenis van den heer L.J. Goddefroy, zooals ze werd beschreven in het “ Algemeen Handelsblad ” » dans la série De verhalen van anderen. Amsterdam : auto-édité, non disponible dans le commerce. Friedman, Kajsa Ekholm (1991), Catastrophe and Creation. The Transformation of a n A frican Culture. Chur etc, Harwood Academic Publishers. Graburn, Nelson H.H. ed. (1976), Ethnic a nd Tourist Ar ts: Cultural Expressions from the Fourth World. Berkely, University of California Press. Jenkins, Della (2003), Nineteenth Century Loango Coast Ivories. Thèse de doctorat, University of California Santa Barbara. Jules-Rosette, Bennetta (1984), The M essages of Tour ist Ar t: a n African Semiotic System in Comparative Perspective. New York, Plenum. Lang, Herbert (1918), « Famous Ivory Treasures of a Negro King ». The American Museum Journal, p. 527-552. Lips, Julius (1983), Der Weisse im Spiegel der Farbigen. Leipzig, Veb. E.A. Seemann. Mack, John (1990), Emil Torday a nd the Ar t of the Congo, 1900-1909. Seattle, University of Washington Press. Martin, Phyllis (1972), The External Trade of the Loango Coast, 1576-1870. The Effects of Changing Commercial Relations on the Vili Kingdom of Loango. Oxford, Clarendon Press. Muller, Hendrik (1977), Muller, een Rotterdams Zeehandelaar : Hendrik Muller Szn. (1819-1898). Schiedam, Interbook International. Nicolls, Andrea (1998), A Sp iral of Hi story. A Ca rved Tusk from the Loango Coast, Congo. Washington, DC, National Museum of African Art. Pechuël-Loesche, E. (1907), Volkskunde von Loango. Stuttgart, Strecker & Schröder. Regeer, J.W. (1882), Schetsen van Afrika’s Zuidwestkust. Brieven uit Sonjo. Rotterdam, s.l.: s.n.. Roberts, Allen F. (1995), Animals in African Art. From the Familiar to the Marvelous. New York, The Museum for African Art. Ross, Doran H. (ed.) (1992), Elephant. The Animal and its Ivory in African Culture. Los Angeles, Fowler Museum of Cultural History, UCLA. Schildkrout, Enid and Curtis A. Keim (1990), African Reflections: Art from Northeastern Zaire. Seattle etc., University of Washington Press. Schildkrout, Enid and Curtis A. Keim (1990b), « Mangbetu Ivories: Innovations between 1910 and 1914 ». Discussion Papers in the African Humanities. AH Number 5. Boston, MA, FIG. 22 : Détail de la défense en fig. 2 représentant un homme attaqué par un crocodile qu'il tient en l’air par la queue. FIG. 21 : Détail de la défense en fig. 7 montrant un homme en proie à un boa constrictor qu’un autre personnage essaye d’écarter.


Layout1
To see the actual publication please follow the link above