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90 FIG. 12 : Figure à double tête. Tahiti, îles de la Société, Polynésie. Début du XIXe siècle. Bois. H. : 59 cm. British Museum, Londres. © The Trustees of the British Museum. FIG. 13 : Figure masculine ti’i Tahiti, îles de la Société, Polynésie centrale. XVIIIe siècle ou avant. Bois. H. : 58,4 cm. Bishop Museum, Honolulu. Photo : Dave Franzen. pensées. Mahiriki Tangaroa, conservateur du National Museum des îles Cook, m’a conseillé d’accepter simplement les choses et de me concentrer sur les lieux d’interaction entre les gens, les objets d’art et l’atua – l’enceinte sacrée. Cette idée m’a semblé raisonnable, car elle me ramenait sur le terrain, en Polynésie centrale, face à la réalité des atua dans leur environnement naturel. Une fois les questions financières réglées, j’ai visité divers endroits de Polynésie, rencontré des gens, exploré des marae (clairières sacrées) et tenté de comprendre ce que l’on voulait dire lorsque l’on me parlait des atua. Il était évident que deux siècles auparavant, la chrétienté avait détourné bon nombre de concepts atua, y compris le mot atua lui-même, qui avait fini par désigner le dieu chrétien dans de nombreuses régions de Polynésie. J’ai découvert aussi que beaucoup de Polynésiens considéraient les atua comme des esprits malveillants, une autre croyance héritée des premiers missionnaires et de leur évangélisation. D’autres voyages, d’autres rencontres et quelques interactions supplémentaires avec une « présence » inexplicable ma pause, je suis allé revoir la figure tahitienne. Elle était là, dans un coin. Elle m’a vu et m’a souri en signe de reconnaissance. Je me tenais là, un peu confus, car je savais que le bois n’était pas capable de sourire. Je suis resté environ dix minutes avec elle, puis je suis remonté et j’ai demandé si je pouvais voir son dossier. Kamalu me l’a apporté. Il comportait notamment un article écrit par Peter Buck (Te Rangi Hiroa) en 1939 dans lequel il mentionnait : « Les images en bois de Tahiti dénommées ti’i (tiki) étaient utilisées par les sorciers en guise de lieu de repos pour les esprits familiers » ; et il se reportait à la plaque VII qui était une photo de mon ami tahitien (« Mangarevan Images, » Ethnologica Cranmorensis 4 : 1939). Je me suis demandé d’où il tirait cette information et si mon ami lui avait également souri. J’étais quelque peu réticent à admettre cette situation. La figure avait visiblement l’air de me sourire et d’interagir avec moi, mais il était également possible que je fusse en train de perdre la raison. Et puis, l’esprit familier d’un sorcier, c’était quoi au juste ? Je ne suis pas sorcier, donc pourquoi la figure me souriait-elle ? J’étais à la fois troublé et intrigué par ces


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