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PERSONNALITÉ Rencontre avec un créateur d’images : Hughes Dubois ou un regard photographique 134 FIG. 1 : Hughes Dubois travaillant à l’exposition Formes&Façons pour le Musée de Bagnes (Suisse) présentée sur le barrage de Mauvoisin, 2013. FIG. 2 (EN BAS) : Photographie d’une maquette de pirogue de l’île Wuvulu pour le remarquable ouvrage de Kevin Conru Art de l’Archipel Bismarck, Éd. 5 Continents, 2013. FIG. 3 (À DROITE) : Photographie de la statue hemba (R. D. Congo) de Jacques Blankaert, la première rencontre de H. Dubois avec l’art tribal. © de toutes les images : Hughes Dubois. Propos recueillis par Elena Martínez-Jacquet « Il y a autant de façons de photographier qu’il y a de photographes, de même qu’il y a autant de façons de regarder un objet d’art qu’il y a de gens qui le contemplent ». Cette phrase, qu’Hughes Dubois prononçait au tout début de l’entretien livré ci-après, appelle un corollaire que ce photographe, dont l’objectif s’est posé sur tant de chefs-d’oeuvre d’art tribal, n’aurait, par modestie, jamais prononcé : « mais tous les regards ne se valent pas ! ». Celui de Dubois est exceptionnel. Sensible, respectueux, analytique et curieux, il témoigne d’une profonde connaissance et intimité avec les arts d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques, développée au cours d’une carrière déjà longue de plus de trente ans. Et pourtant, rien ne prédestinait a priori ce fils d’industriel de la Picardie belge ayant d’abord évolué dans le domaine de la publicité et du marketing à devenir l’auteur de plus de trente mille clichés pour le compte des principaux acteurs – privés et institutionnels – du monde de l’art tribal. Nous avons eu l’opportunité de revenir avec lui sur ses débuts et de discuter longuement sur son rapport aux arts premiers. Tribal art magazine : Aujourd’hui, ton nom figure dans les crédits de presque toute publication dévolue à l’art tribal. Mais cela, tu le rappelles souvent, est le résultat d’un long parcours. Pourrais-tu revenir sur ta rencontre avec les arts premiers ? Hughes Dubois : Je travaillais à l’époque comme directeur artistique dans une agence de publicité bruxelloise et, dans le cadre de mon métier, j’étais en contact avec de nombreux studios de photographie publicitaire. L’un des plus reconnus était celui de Roger Asselberghs, que j’ai rencontré dans ce contexte. Un jour, alors que je me trouvais dans son studio, François Neyt et Jacques Blankaert sont arrivés avec une Hemba pour La Grande statuaire hemba du Zaïre (1977). J’ai été complètement fasciné par la personnalité de cet objet. La photographie me passionnait depuis l’enfance mais je ne soupçonnais pas que l’on pouvait en faire un métier. J’ai tout abandonné pour aller travailler avec Roger ; pendant un an j’ai été son troisième assistant et celui qui faisait aussi la vaisselle au studio, puis j’ai pu ensuite commencer à m’impliquer dans les prises de vues et ce chaque fois davantage. J’ai beaucoup appris sur la technique photographique à ses côtés : on faisait beaucoup de publicités et de temps à autre, de la photographie d’objets. Il y avait une très belle synergie entre nous deux. Mais il ne m’a rien livré sur les objets, or j’avais envie de comprendre les oeuvres d’art qui nous étaient confiées. Par la suite, je me suis installé à mon compte en tant que photographe publicitaire et j’ai fait une nouvelle fois une rencontre qui s’est avérée encore plus déterminante : celle d’Émile Deletaille. C’est avec lui que j’ai vraiment appris à regarder : la photo était importante, mais c’était l’objet qui primait. J’ai commencé à collaborer avec Émile pour un projet de publication sur les arts précolombiens sur lequel il travaillait avec deux autres collectionneurs : Gérald Berjonneau et Jean-Louis Sonnery. Après cet ouvrage qui est paru en 1985 aux Éditions Arts 135 sous le titre Rediscovered masterpieces of Mesoamerica, nous avons prolongé l’expérience pour un nouvel ouvrage : Chefs-d’oeuvre inédits de l’Afrique noire, qui allait en fait annoncer l’ouverture de la Fondation Dapper. C’est grâce à ce projet que Michel Leveau a connu


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