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MUSÉE à la Une 92 FIG. 23–25 : Technique de la fonte à la cire perdue. Village d’Anna, Côte d’Ivoire. Photos d’Eliot Elisofon, 1972. Eliot Elisofon Photographic Archives, EEPA EECL 6947, 6963, 6974. National Museum of African Art, Smithsonian Institution. L’art comme processus : de la photographie séquentielle au cinéma et à la télévision Il a fallu un photographe de plateau pour voir ce que les directeurs de la photographie n’avaient pas vu pendant des années. Jacquelyn Judge, éditeur de Modern Photography Elisofon était passionné par le processus artistique lorsqu’il photographiait l’art in situ en Afrique. Son appareil s’attardait souvent sur les artistes en train de travailler et documentait avec force détails la production des arts et artisanats au sein de cultures africaines diverses. Il commanditait fréquemment des oeuvres d’art et réalisait des séries de photos illustrant leur production en noir et blanc et en couleurs (fig. 23-25). Son intérêt pour la photographie séquentielle l’amena à s’impliquer davantage dans l’image en mouvement. Il commença à participer à des productions hollywoodiennes, d’abord comme conseiller en couleurs et photographe de plateau, puis comme réalisateur et producteur de documentaires éducatifs et séries télévisées sur les arts et les cultures d’Afrique. La partie « L’art comme processus » de L’Afrique revue souligne les liens intrinsèques entre les archives photographiques et la collection permanente du musée. Les images d’Elisofon représentant la coiffure traditionnelle d’une femme mangbetu – une très belle armature rigide en forme d’auréole où se mêlent roseaux tissés et cheveux tressés – constituent le parfait exemple de sa photographie séquentielle et de sa pratique de la photographie. La coiffure élaborée accentue l’idéal de beauté mangbetu, en particulier le front haut et le crâne allongé obtenus en enserrant la tête des bébés dans des cordelettes. Des portraits exotiques de cette coiffure par des voyageurs européens à partir des années 1870 (notamment la reine Elizabeth II) furent diffusés sur des cartes postales, des timbres et des affiches de film et étaient devenus le symbole de l’Afrique centrale au début et au milieu du XXe siècle.22 Guidé par une théorie d’« ethnographie de préservation » qui se développa à la fin du XIXe et au début du XXe siècle (à savoir la notion selon laquelle les cultures « primitives » ou indigènes étaient « en voie de disparition » en raison des assauts de la civilisation occidentale), Elisofon s’efforça de capturer sur pellicule ce qu’il percevait comme étant des traditions culturelles disparaissant rapidement. Bien que le peuple Mangbetu ne pratiquât plus l’allongement du crâne des bébés en 1970, il rencontra une femme d’un certain âge à la tête allongée qui savait encore comment créer la coiffure traditionnelle. Dans son rôle de photographe de la mémoire, Elisofon passa deux jours à photographier la démonstration, en noir et blanc et en couleurs. Dans l’exposition, un petit écran vidéo présente un diaporama de la totalité de la séquence des images en couleurs de cette femme tissant la


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