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La principale contribution d’Eliot, hormis ses photographies elles-mêmes, a été d’éveiller les Occidentaux à la véritable humanité de l’Afrique. 84 Warren Robbins, Hommage à l’Afrique, 1973 En 2013-2014, le National Museum of African Art de Washington, D.C. célèbre le quarantième anniversaire de la création des Archives photographiques d’Eliot Elisofon au moyen d’une petite rétrospective consacrée à la collection d’art et de photos d’Afrique d’Eliot Elisofon (1911-1973).1 Le titre de l’exposition, L’Afrique revue : l’héritage photographique d’Eliot Elisofon, invite à réfléchir, quelque soixante ans plus tard, à l’impact des photos d’Elisofon sur l’Afrique et ses peuples. L’exposition revient sur les trente années durant lesquelles Elisofon voyagea en Afrique, afin de prendre des photos pour LIFE magazine, de collectionner, d’écrire, de réaliser des films et de produire des émissions pour la télévision. Elle présente une sélection d’oeuvres d’art issues de la collection d’Elisofon parallèlement à ses épreuves d’époque en noir et blanc, ses premières diapositives en couleurs, ses photos expérimentales réalisées en studio, ses productions cinématographiques et ses émissions de télévision. Elisofon a joué un rôle clé dans la création de représentations populaires de l’Afrique durant l’après-guerre et les années d’indépendance. De 1947 à 1972, il entreprit sept expéditions en Afrique pour LIFE magazine et d’autres éditeurs et producteurs. Ses photos furent abondamment publiées dans LIFE, notamment plusieurs reportages sur l’art, la politique et la nature en Afrique.2 À une époque où la télévision n’était pas répandue, Elisofon introduisit l’Afrique dans les foyers – en particulier aux États-Unis – grâce à ses images colorées, qui présentaient au public un continent riche en traditions artistiques et empreint d’une grande diversité culturelle. Plus que tout autre photographe du milieu du XXe siècle, les images d’Afrique d’Elisofon diffusées dans les médias ont façonné les perceptions euro-américaines de ce continent et ses populations. Dans L’Afrique revue, le visiteur est conduit à s’intéresser à la passion singulière d’Elisofon pour la sculpture africaine, qu’il collectionna et photographia en Afrique. L’exposition présente une sélection d’objets de sa collection, certains associés à des photos de l’objet réel en train d’être créé, utilisé, porté ou joué. Elle accorde une attention particulière aux Par Amy J. Staples photos expérimentales d’Elisofon, qui photographiait des oeuvres d’art dans son studio en ayant recours à des techniques visuelles innovantes – expositions multiples, lumière stroboscopique, flash répétitif et épreuves hétéroclites visant à souligner les caractéristiques formelles et fonctionnelles des objets. Cette mise en valeur de la nature créative et expérimentale de la photographie d’Elisofon et sa contribution à une esthétique moderne est étroitement liée au travail de Pablo Picasso et d’autres cubistes, qui transformèrent des sculptures africaines (à l’origine, des artefacts « primitifs ») en oeuvres d’art moderne au début du XXe siècle.3 Par l’entremise de sa photographie d’art, Elisofon incorpora une sensibilité cubiste qui transporta l’étude et la perception de la sculpture africaine dans le monde de la photographie et influença notre façon de voir et d’interpréter les arts d’Afrique. Voyage dans les arts d’Afrique Le travail d’Elisofon en tant que photojournaliste pendant la campagne de l’armée américaine en Afrique du Nord durant la Seconde Guerre mondiale constitue le point de départ de sa fascination pour l’Afrique et ses arts et cultures.4 Alors qu’il couvrait le débarquement des troupes américaines à Casablanca en 1942, il devint le premier photographe de presse à prendre des clichés de scènes d’action en Tunisie. Sa photo du général George S. Patton installé sur un char à Fort Benning, en Géorgie, illustra la première couverture en couleurs de LIFE magazine.5 Cette image fut la première des vingt-huit photos de couverture qu’Elisofon réalisera pour LIFE entre 1947 et 1964. Cinq ans plus tard, en 1947, LIFE attribua à Elisofon sa première mission officielle en Afrique subsaharienne : photographier le roi George VI au Cap, en Afrique du Sud. Sa mission terminée, Elisofon eut la ferme intention d’explorer l’Afrique par voie terrestre. Durant les quatre mois suivants, il parcourut la célèbre route « du Cap au Caire »6 en voiture, bateau à roues à aubes, navire à moteur et train, et photographia les peuples d’Afrique centrale, d’Afrique de l’Est et de la région du Nil. Au cours de ces voyages, Elisofon se rendit chez les Kuba dans le village de Mushenge au Congo belge (aujourd’hui la R. D. Congo) et se lia d’amitié avec le roi (nyim) Mbopey Mabiinch ma-Kyeen (qui régna de 1939 à 1969). Leurs relations et leur collaboration donnèrent lieu FIG. 1 : Le Général George S. Patton Jr., sur son char, Second Armored Division, Fort Benning, Géorgie. LIFE magazine, 7 juillet 1941. Photo d’Eliot Elisofon, 1941. Time & Life Pictures/Getty Images. FIG. 2 : Carte retraçant le périple d’Elisofon de Cape Town au Caire en 1947. Eliot Elisofon Photographic Archives. National Museum of African Art, Smithsonian Institution. FIG. 3 : Le roi kuba, ou nyim, Mbopey Mabiintsh ma- Kyeen (r. 1939–69), Mushenge, R. D. Congo. Photo d’Eliot Elisofon, 1947. Épreuve à la gélatine argentique. Eliot Elisofon Photographic Archives. National Museum of African Art, Smithsonian Institution. FIG. 4 : Vue de l’exposition L’Afrique revue montrant un tirage sur aluminium brossé du roi kuba, ou nyim, Mbopey Mabiintsh ma- Kyeen. National Museum of African Art, Smithsonian Institution. Photo : Franko Khoury. FIG. 5 : Sculpteur kuba taillant un éléphant. Mushenge, R. D. Congo. Photo d’Eliot Elisofon, 1947. Épreuve à la gélatine argentique. Eliot Elisofon Photographic Archives. National Museum of African Art, Smithsonian Institution. MUSÉE à la Une L’Afrique revue : L’HÉRITAGE PHOTOGRAPHIQUE D’ELIOT ELISOFON


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