MUSÉE à la Une 72 côtés d’objets traditionnels du XIXe ou du début du XXe siècle. Ceci s’explique notamment par le fait que les jeunes sculpteurs africains ne souhaitent pas être perçus dans le même contexte que leurs prédécesseurs, leurs oeuvres étant censées être approchées dans une perspective artistique plutôt qu’ethnographique. Une autre raison est la rupture de tradition entre les générations. En outre, nous ne devons pas oublier que les maîtres dits classiques ont connu d’abord toutes sortes d’invasions, ainsi que les vagues de migrations et les révolutions économiques globales qui ont accompagné la colonisation de l’Afrique de l’Ouest. Même les artistes « traditionnels » de la fin du XIXe siècle n’étaient pas isolés du reste du monde. Aujourd’hui, les artistes africains s’intéressant au travail de leurs prédécesseurs sont nombreux. La différence est qu’ils ne puisent plus leur inspiration dans des croyances traditionnelles et que leur art n’est pas conçu comme un intermédiaire avec le monde des esprits comme cela était le cas. Bien au contraire, leurs créations montrent un nouveau type de prise de conscience de soi (fig. 25). Le sujet de recherche au coeur de cette exposition est voué à des développements fascinants. Dans son texte d’introduction publié dans le catalogue, Eberhard Fischer souligne bien que « l’exploration scientifico-artistique de la "région artistique de la Côte d’Ivoire" n’en est qu’à ses débuts ; la recherche est plus avancée au Nigeria, et notamment dans la région méridionale où l’existence d’ateliers a été soulignée en pays Yoruba, Bini, Ibo et Ijo. Également à leurs débuts, les études sur les sculpteurs du Cameroun, du Gabon et de plusieurs régions du Congo ont déjà, elles, abouti à des résultats passionnants. L’histoire de l’art africain est encore à écrire, mais elle s’avère un domaine de recherche extrêmement fertile ». Il ne s’agit plus seulement de mieux regarder les objets africains et de mieux savoir les classer selon leurs auteurs, mais surtout d’en finir avec l’idée fausse du sculpteur africain anonyme. Le temps est venu d’associer des oeuvres grandioses à des individus particuliers dont il est
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