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PORTFOLIO 140 Esprits dansants : Illustrations choisies dans « Hopi Katcinas Drawn by Native Artists » Par Winfield Coleman La « Route de la vie » hopi, voyage à la fois physique, temporel et spirituel, s’effectue en un cycle annuel de neuf grandes cérémonies qui théâtralisent les lois universelles de la vie. Ces célébrations complexes, qui se déroulent sur les trois mesas arides au nord de l’Arizona, terre natale des Hopi, mettent en scène les personnifications des puissances formant leur panthéon. Les entités associées à la croissance du maïs, qu’elles soient bénéfiques ou maléfiques, sont également représentées. Alors qu’elles servaient à l’origine à s’attirer les faveurs de ces puissances, les cérémonies sont aussi destinées à l’éducation et au divertissement. Un kachina (du hopi katsina, pl. katsinim) est un esprit généralement invisible que l’on trouve dans les pratiques religieuses des Indiens pueblo de l’Ouest (Waters 1950 : 277). Ce terme s’applique tout à la fois aux membres masqués de la communauté qui incarnent les esprits et sont habités par eux et aux poupées en bois représentant ces esprits (Colton 1959 : 4). Ces figurines, traditionnellement sculptées par les oncles, sont remises aux filles lors des cérémonies d’été, afin de les familiariser avec certains kachinas, dont le nombre est inconnu et varie d’une communauté à l’autre. Les croyances autour des kachinas reposent sur l’idée que tout ce qui nous entoure est animé d’une force vitale avec laquelle les humains doivent interagir pour assurer leur survie. Les kachinas peuvent représenter des événements historiques, des ancêtres, d’autres peuples, des entités naturelles (le soleil, les étoiles, les nuages et les pierres), des forces comme les orages ou le vent, des lieux, des minéraux, des plantes, des animaux, ou encore une combinaison de ces éléments. Aucun d’eux ne fait l’objet d’un culte spécifique, mais chacun est un esprit puissant capable d’aider les humains en apportant la pluie ou en offrant une protection. On raconte que les kachinas peuplent les San Francisco Mountains (près de l’actuelle ville de Flagstaff, dans l’Arizona) qu’ils quittent pour rejoindre les mesas hopi à l’occasion des cycles de cérémonies annuels. Le nom dérive de ka, « respect », et china, « esprit » (Waters 1963 : 167). Les Hopi ont aussi des divinités, environ trente-six, dont certaines sont également évoquées dans leurs danses (Colton 1959 : 77). La distinction entre les esprits et les divinités n’est pas claire, et ne fait pas véritablement sens pour les Hopi eux-mêmes. Jesse Walter Fewkes (1850–1930) fut formé à Harvard et étudia la zoologie à Leipzig, en Allemagne. Ses premiers travaux portèrent sur l’étude des invertébrés inférieurs (Hough 1932 : 262). Il se consacra ensuite à l'anthropologie, après un voyage par voie ferrée vers la côte Pacifique. À son retour, il fut nommé ethnologue de l’expédition archéologique Hemenway dans le Sud-Ouest (1886-1894), remplaçant Frank Hamilton Cushing, souffrant. Fewkes étudia les Hopi, à qui il porta une affection profonde. Fewkes travailla plus tard comme ethnologue au Bureau of American Ethnology en 1895 et poursuivit ses études de terrain jusqu’en 1918, lorsqu’il fut nommé directeur de cet organisme (Ibid. : 264). Pendant son séjour dans le Sud-Ouest, Fewkes consigna les rites du cycle cérémoniel annuel des Hopi et s’en servit pour chercher à expliquer, avec parfois d’heureux résultats, des antiquités de la région. Plus tard, il persuada le gouvernement américain d’attribuer le statut de monuments nationaux à certaines régions abritant des ruines (Ibid. : 267). Bien que la contribution de Fewkes puisse inévitablement faire l’objet de quelque révision, du fait des impératifs déconstructivistes du postimpérialisme, ses travaux demeurent d’une importance fondamentale. Inspiré par l’analyse de codex mexicains illustrés par des artistes indigènes, Fewkes décida d’engager des artistes hopi FIG. 1 : Jesse Walter Fewkes, avant 1919. D’après Frances S. Nicoles, Biography and Bibliography of Jesse Walter Fewkes, 1919. FIG. 2 (CI-DESSOUS) : Photographe inconnu, Sud du village pittoresque de Walpi, première mesa, réserve des Indiens hopi, Arizona. Carte stéréoscopique publiée par Works and Studio, Underwood & Underwood, 1903. FIG. 3 (À DROITE) : Tawa (kachina du soleil). La division du visage est typique du dieu du soleil, qui représente le zénith et la force de vie. Dans une main, il tient une flûte phallique, tandis que l’autre agrippe un pin (Fewkes 1899 : 100- 101), associé à la foudre. Notez le symbole du nuage de pluie et la tige de maïs. Le Tawa est incarné lors de l’Oraibi Soyal par un membre du clan du soleil (Colton 1959 : 80). Reproduction photo par Scott McCue.


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