Page 132

CoverT71_FR.qxd_CoverF Vuvi

HISTOIRE d’objet FIG. 14 (CI-DESSUS) : Vue latérale du masque de la fig.1 présentant l’oiseau restauré. © Musée royal de l’Afrique centrale. Photo : J. Van de Vyver. Le replacement définitif de l’oiseau à l’arrière du masque est le fruit d’une collaboration scientifique efficace à laquelle participèrent A.-M. Bouttiaux (MRAC), G. Dewispelaere (ENSAV-La Cambre) et M. Ghysels (Scantix). Le financement de cette restauration fut assuré par le fonds InBev-Baillet Latour. FIG. 15 (CI-CONTRE) : Masque-heaume chikwanga. Luntu, R. D. Congo. Bois et pigments. H. : 38 cm. Collection privée belge. 130 Cependant, le deuxième animal, dont la candidature iconographique apparaît d’un prime abord moins judicieuse, possède lui aussi de sérieux arguments. Ainsi, la manière dont les cornes sont implantées, et qui se distingue par une base massive, rappelle fortement les caractéristiques de celles d’un buffle. On peut néanmoins rétorquer à cette observation qu’elle n’évince que très difficilement « l’hypothèse bélier » dans le sens où elle ne justifie pas la courbe exagérée des cornes qui va de l’arrière vers l’avant et non vers l’extérieur. Pourtant, cette courbure peut, elle aussi, servir « l’hypothèse buffle » pour peu que l’on quitte le domaine de la stricte représentation naturaliste pour l’aborder sous l’angle de la technicité et de l’esthétique. De fait, si l’on compare l’exemplaire de la figure 1 avec un masque buffle tabwa (fig. 17), on se rend immédiatement compte de la différence de volume de matière nécessaire à leur fabrication. Le masque de Tervuren est, répétons-le, de type heaume, alors que celui des Tabwa est facial. Sculpter un masque-heaume monoxyle demande un tronc d’arbre suffisamment imposant. Si l’on devait rajouter à cela un développement cornu s’étendant horizontalement dans un souci naturaliste, il y a fort à parier qu’il serait difficile de trouver un tronc de mugongo (Ricinodendron rautanenii) assez large pour mener à bien cette opération ; sans compter que les risques de fêlure augmenteraient avec la masse. D’autre part, à la différence de son cousin tabwa, le masque-heaume de Tervuren ne représente pas à proprement parler un buffle, mais relève clairement d’une naturalistische permutation c’est-à-dire, dans le cas présent, de l’adroite combinaison d’éléments humains et animaliers. D’un point de vue esthétique, le choix de cornes représentées de façon réaliste risquerait de nuire à l’équilibre formel de l’objet axé autour de la rondeur du visage humain. Des exemples d’adaptation formelle pour un besoin plastique se retrouvent dans d’autres cultures du monde. De fait, F. Boas (rééd. 2003, p. 249) puise dans la culture tlingit pour présenter un cas d’adaptation d’un modèle plastique (l’orque) à sa destination fonctionnelle (la massue). La nageoire dorsale de l’épaulard (Orcinus orca) est nécessairement présente, car elle est le symbole plastique principal de ce cétacé. Pourtant, si l’aileron était représenté dressé comme cela s’observe dans la nature, mais aussi habituellement dans l’art tlingit ou haïda, cela rendrait la massue peu ergonomique. C’est FIG. 16 : Dessin d’une massue de chasse tlinglit conservée au American Museum of Natural History de New York, inv. E/242. © Tribal Art magazine.


CoverT71_FR.qxd_CoverF Vuvi
To see the actual publication please follow the link above