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MUSÉE à la Une La tête de Mahin Parmi les oeuvres dont la provenance est restée inconnue pendant des dizaines d’années, se trouve la tête de Mahin, objet énigmatique qui quitta l’actuel Nigeria avant l’Expédition 88 punitive (fig. 14). Quelque part entre 1880 et 1885, l’amapetu (roi) du royaume côtier d’Ugbo-Mahin fit cadeau de cette pièce à l’allemand Eugen Fischer, représentant basé à Lagos de la société de Hambourg G. L. Gaiser. Fischer s’était rendu plusieurs fois à Mahin afin de nouer des relations commerciales et représenter les intérêts allemands.36 L’objet demeura dans la famille Fischer jusqu’à sa mise en vente aux enchères chez Sotheby’s, à Londres, en décembre 1971. Créée par des artistes du royaume de Bénin, certains pensent qu’elle représente un chef vaincu ou « tête-trophée », peut-être un roi de Mahin, conquis à la fin du XVIe siècle par l’armée de l’Oba Orhogbua. Elle a pu être envoyée à Ugbo-Mahin en guise de rappel permanent de la supériorité de Bénin. Le symbolisme d’un petit groupe de têtes commémoratives portant des récipients à long col en forme de gourde semble complexe, mais montre clairement que les personnages représentés sont des chefs soumis. Dans une étude récente sur ces têtes, Kathy Curnow remarque que « bien qu’il le chef porte une charge – signe de labeur et insulte au caractère sacré de la tête – le support du porteur démontre son rang, car il s’agit d’un cercle perlé ».37 Une salière sapi-portugaise La dernière oeuvre mise en lumière dans cette brève vue d’ensemble ne provient pas de Bénin. Il s’agit d’une salière en ivoire sapi-portugaise datant de la fin du XVe ou du début du XVIe siècle (fig. 15). Elle appartint, à une époque, à Charles Ratton, célèbre collectionneur et marchand de Paris, et fut vendue plus tard par John Julius Klejman, propriétaire de la galerie J. J. Klejman à New York. Quand les Portugais débarquèrent sur la côte de l’Afrique de l’Ouest à la fin du XVe siècle, des artistes des actuelles Sierra Leone et Guinée se mirent très vite à créer de splendides oeuvres en ivoire pour leurs nouveaux clients étrangers : cuillères, cornes à poudre et salières. Elles mariaient les formes et esthétiques africaines et européennes afin de satisfaire le goût des commanditaires. Dans cette oeuvre, sculptée dans un seul bloc d’ivoire, des crocodiles ornent un support ajouré qui soutient un récipient en forme de gourde utilisé pour contenir du sel. Susan Vogel lui accorda une place importante dans son introduction au catalogue phare de 1988 Afrique et Renaissance : art en ivoire, même si sa taille et sa provenance étaient inconnues à l’époque. Vogel décrit la partie sphérique du récipient comme étant un parfait exemple de la façon dont ces ivoires intègrent non seulement des motifs étrangers, mais évoquent également des formes africaines, en l’occurrence des pots, gourdes et récipients en bois aux fonds arrondis.38 Désormais accessibles au public dans une magnifique nouvelle galerie, cette oeuvre ainsi que d’autres objets significatifs de la collection Robert Owen Lehman peuvent à nouveau être examinés et appréciés par les nombreux visiteurs qui se rendent au Museum of Fine Arts de Boston. Cette brève introduction à la galerie du royaume de Bénin et à la collection Robert Owen Lehman reflète le travail d’équipe de nombreux membres du personnel du Museum of Fine Arts de Boston, en particulier Victoria Reed, conservatrice Monica S. Sadler pour l’étude des provenances, qui entreprit des recherches sur l’histoire des objets. Mes remerciements vont également à Barbara Martin, conservatrice Alfond de l’éducation, Adam Tessier et Karen Frascona pour leurs conseils. Tout au long de mes recherches lors de la préparation de la galerie, j’ai sollicité des collaborateurs qui m’ont donné des informations précieuses et ont émis des suggestions, plus particulièrement Paula D. Girshick, Hermione Waterfield, Barbara W. Blackmun, Kathryn Gunsch, Barbara Plankensteiner, Kathleen Berzock, Joseph Nevadomsky et Alison Petch. Merci à tous. FIG. 14 : Tête commémorative d’un chef vaincu. Edo, royaume de Bénin, Nigeria. XVIe siècle. Alliage cuivreux et fer. H. : 50,8 cm. Museum of Fine Arts, Boston, collection Robert Owen Lehman. Avec l’aimable autorisation du Museum of Fine Arts, Boston. FIG. 15 (PAGE SUIVANTE) : Salière (couvercle manquant). Sapi, Sierra Leone et Guinée. Fin du XVe – début du XVIe siècle. Ivoire. H. : 15,2 cm. Museum of Fine Arts, Boston, collection Robert Owen Lehman. Avec l’aimable autorisation du Museum of Fine Arts, Boston.


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