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81 Le Museum of Fine Arts de Boston a récemment dévoilé sa nouvelle galerie du royaume de Bénin consacrée à la collection Robert Owen Lehman de bronzes1 et d’ivoires créés dans ce royaume, situé dans l’actuel Nigeria (fig. 1).2 Léguée au musée en 2012, la collection Lehman constitue l’ensemble d’objets anciens de Bénin le plus remarquable qui soit. La nouvelle galerie expose trente-six objets (dont deux prêts de la collection Lehman) parmi lesquels trente bronzes et six ivoires, tous datant d’une période allant du XVe au XIXe siècle. Elle comprend également deux ivoires anciens sapi-portugais de Sierra Leone et de Guinée, réalisés par des artistes africains pour le marché européen. Robert Owen Lehman, dont le père était un mécène renommé et dont l’arrière-grand-père fonda la société d’investissement Lehman Bros., acquit des oeuvres sur le marché de l’art dans les années 1960 et 1970.3 Il fut attiré par l’art de Bénin car il estimait que les sculpteurs y créaient des bronzes fondus à la cire perdue parmi les plus raffinés au monde. La nouvelle galerie comble désormais son désir de partager ces objets avec le plus grand nombre, et permet aux visiteurs venus du monde entier de ressentir la puissance, la beauté et l’extrême sophistication technique de ces magnifiques oeuvres d’art. L’installation se veut dynamique et situe les pièces dans leurs FIG. 3 (À GAUCHE) : Chef à cheval (fig. 2). Aquarelle de George Frederick Waldo Johnson. Extrait de : Augustus Henry Lane-Fox Pitt-Rivers, General Fox-Pitt-Rivers: Catalogues of His Collections, 1882– 1899, vol. 5, p. 1638. Cambridge University Library, Department of Manuscripts and University Archives, MS Add.9455. Fig. 4 (EN HAUT À DROITE) : « Figure de guerrier à cheval » (fig. 2). Extrait de : Augustus Henry Lane Fox Pitt Rivers, Antique Works from Benin, collected by Lieutenant General Pitt Rivers, Londres, 1900, planche XIII, fig. 79-81. Avec l’aimable autorisation de The William Morris Hunt Memorial Library, Museum of Fine Arts, Boston. contextes artistiques et historiques. Elle raconte la trajectoire de ces splendides objets – sculptures, plaques en relief, objets rituels et regalia – ainsi que l’histoire et les traditions complexes des Edo qui peuplent le royaume. L’histoire du royaume de Bénin est bien connue et a fait l’objet de nombreux écrits.4 Selon ceux-ci, l’étape fondatrice du royaume sous sa première dynastie, les Ogisos, connus comme les « chefs venant du ciel », demeure mystérieuse. Les rois de la seconde dynastie, fondée par le prince Oranmiyan au XIIe siècle, consolidèrent l’État entre les XIIIe et XVe siècles. Leurs descendants règnent encore aujourd’hui sur le royaume de Bénin.5 Les premiers contacts avec les navigateurs portugais survinrent durant les dernières années du règne de l’Oba (le roi) Ewuare le Grand (vers 1440-1473), lorsque les navires touchèrent la côte. Vers la fin du XVe siècle, les Portugais pénétrèrent dans l’intérieur des terres du royaume de Bénin. Par leur intermédiaire, ce royaume bénéficia d’un accès aux réseaux commerciaux de l’Atlantique et échangea esclaves, ivoire, tissu et poivre contre textiles, perles de corail, alliages de cuivre et armes à feu.6 À la fin du XVe siècle et au XVIe siècle, il connut une période de grande prospérité. Aidés par leurs alliés portugais, Oba Ozolua (qui régna de 1481 à 1504 environ) et son successeur Oba Esigie (qui régna de 1504 à 1550 environ) repoussèrent les frontières du royaume et prirent le contrôle des routes commerciales et des échanges. L’art de cour était florissant et attestait la richesse du royaume. Tout au long des XVIIe et XVIIIe siècles, en dépit de conflits internes, il demeura un partenaire commercial important


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