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121 FIG. 3 : Sculpture. Tellem, Mali. Bois. H. : 59 cm. Photo : Alex Arthur. FIG. 4 : Sculpture de musicien. Bamana, Mali. Bois. H. : 89 cm. Ex. Coll. Pierre Harter. Photo : Alex Arthur. M. L. : Pas vraiment. Je me reconnais davantage dans le mot « amateur » que « collectionneur ». Dans les années 1960, j’ai navigué en « mer primitive » de façon mesurée. J’ai acheté un Tellem (fig. 3), toujours à Kamer, marié alors à Hélène Leloup, qui l’a récemment sélectionné pour son exposition Dogon au musée du quai Branly. Ma première épouse avait acquis auprès de René Rassmussen une figure bamana très ancienne au volume fessier somptueux. J’ai aussi acheté un petit Lega au marché aux puces. Il n’est même pas en ivoire, mais en os… À mes débuts j’ai surtout acheté de la peinture non figurative et des meubles. Par bonheur, dans le premier appartement que j’occupais avec mon épouse, je n’avais aucun meuble de famille. En revanche, nous avions déjà un Poliakoff, un Vieira da Silva et deux oeuvres de Simon Hantaï sur les murs. Et c’est en fonction des tableaux acquis que j’ai acheté le mobilier haute époque espagnol et français que je conserve avec grand plaisir. Ma rétine perçoit une harmonie heureuse entre ce mobilier, la peinture moderne et les objets d’art tribal, cohérence qui n’existerait pas avec du Louis XV ou du Louis XVI… Nous trouvons qu’ainsi les objets sont bien intégrés dans le paysage de l’appartement. Puis dans ma vie d’amateur, il y a eu un moment où la peinture est devenue hors de portée. Je me suis alors tourné vers l’art tribal, dont j’avais envie depuis longtemps et qui était, à l’époque, plus abordable. Dans les vingt dernières années, mes achats dans ce domaine ont pris le dessus, même si cela m’arrive encore d’avoir des coups de foudre pour la peinture. Ces acquisitions, je peux les faire grâce à la vente d’un Dubuffet acheté à grand peine dans mes débuts, grâce au prêt d’un confrère que j’ai remboursé en cinq ans... J’ai conservé ce tableau plus de quarante ans avant de m’en séparer. C’est ainsi que j’ai pu me procurer quelques objets de choix : par exemple cette statue masculine bamana, représentant un musicien, qui compte parmi les belles sculptures connues de ce type (fig. 4). Elle a appartenu à Pierre Harter. T. A. M. : Qu’est-ce qui vous a attiré vers ces objets-là ? Car ils sont très différents les uns des autres… M. L. : Je n’aime pas le mot « collection ». Ma femme Natacha et moi marchons au coup de coeur, objet par objet. Nous n’avons pas l’ambition d’avoir cinq variétés de Jalisco, ni les principaux types de Tellem. Ce que nous acquérons forme, certes, un ensemble assez hétérogène, mais cohérent à notre sens. Nous sommes attirés par le traitement des formes, de préférence sobres de l’art tribal : pas de « Baule Louis XV » – vous voyez ce que je


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