Page 142

I-IVCoverT68 F_CoverF Vuvi

140 Merton Simpson C’est pour moi un privilège de relater le parcours captivant de Merton D. Simpson qui fut, à une certaine époque, le plus grand marchand d’art africain au monde. Merton fréquenta d’abord la galerie de Julius Carlebach afin de se familiariser avec l’art tribal qu’il venait de découvrir lors de ses études en arts visuels à la New York University. Pour le jeune amateur qu’il était alors, cette démarche constituait un défi monumental, surtout si l’on considère qu’il dut compenser par sa passion le manque de références iconographiques et ethnographiques, à l’époque encore rares et très fragmentaires. Dès 1954, Mert, comme ses amis se plaisaient à l’appeler, fonda sa propre galerie sur l’avenue Madison à New York, adresse qui, avec le temps, connut un rayonnement phénoménal. Ce succès s’explique, en grande partie, par le fait que l’homme possédait un don d’exception : celui de reconnaître des oeuvres d’art tribal de grande qualité. Je crois qu’une certaine conjoncture a certes aidé Merton, comme notamment le fait qu’il ait hérité d’un marché qu’avaient consolidé certains de ses prédécesseurs : J. J. Klejman, H. Kamer, etc. Par ailleurs, devenu marchand d’art fin et averti, Merton Simpson sut tisser habilement des liens stratégiques et cruciaux in situ, dans toute l’Afrique subsaharienne. Rappelons que c’est à cette période, entre 1965 et 1990, que les deux tiers de ce patrimoine se retrouvent sur le chemin de l’exil. Parallèlement, Mert effectua de nombreux séjours en Europe : autant de voyages qui lui permirent de localiser plusieurs chefs-d’oeuvre pour le compte d’un noyau dur d’amateurs américains interpellés par le bon et le beau. Les qualités personnelles de Merton et son charisme lui avaient permis de se bâtir une clientèle avec laquelle il avait créé un solide lien de confiance pour ne pas dire une franche amitié, comme ce fut le cas avec le sculpteur et collectionneur, Arman. Rétrospectivement, il serait juste d’affirmer également que bon nombre de musées aux USA portent indubitablement le sceau de la vision de Merton Simpson par la présence, dans leurs salles d’exposition, d’artefacts parmi les plus emblématiques de l’esthétique africaine. En plus d’un oeil aguerri, Merton Simpson possédait aussi un talent de musicien que l’on appréciait à l’occasion de ses légendaires vernissages au cours desquels ses amis jazzmen, tels George Coleman ou Lionel Hampton, n’hésitaient pas à lui prêter main-forte. Merton nous a quittés suite à une longue maladie. La perte de celui qui a su imposer « son regard » sur l’art de l’Afrique traditionnelle marque hélas pour nous tous, en Amérique, la fin d’une époque. Merton, nous saluons chèrement le « chasseur » émérite que tu as été… Merci. Jacques Germain Merton Simpson, Raoul Lehuard et Marceau Rivière au salon de Mars, Paris, 1990. Avec l’aimable autorisation de la Galerie Sao, Paris. HOMMAGE


I-IVCoverT68 F_CoverF Vuvi
To see the actual publication please follow the link above