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Les VUVI et leurs masques UNE CULTURE GABONAISE MÉCONNUE 93 PAGE PRECEDENTE FIG. 1 : Masque, Vuvi, Gabon. Bois, peinture et kaolin. H. : 42,5 cm. Donation M. et Mme Max J. Pincus / The Bridgeman Art Library Detroit Institute of Art, inv. 81.913 Photo © Bridgeman/Detroit Institute of Art. Publié dans Rubin, 1987, p. 364 ; Arts d’Afrique Noire, 1993, n° 86, p. 30 ; Nooter, 1993, p. 150, cat. 70 ; Penney, Kan et Sieber, 1995, p. 118- 119, n° 54. FIG. 2 : Masque, Vuvi, Gabon. H. : 30 cm. Ex. coll. : Isaac Païlès. Localisation actuelle inconnue. Reproduction tirée de Arts d’Afrique noire, octobre 1971, n° 1, p. 46. Avec l’aimable autorisation de Raoul Lehuard. Par Charlotte Grand-Dufay « Entre les rives de la Ngounié et les montagnes du Chaillu, des traditions de “masques blancs” concaves aux formes épurées ont été en contact avec d’autres expressions masquées plus réalistes, telles qu’elles se sont élaborées le long de la côte Atlantique chez les Eshira et chez les Kongo. Le passage des formes concaves, épurées, propres aux zones forestières, à des formes plus réalistes est une constante des groupes humains et des royaumes de la savane subéquatoriale d’ouest en est. » (Neyt, 2010, p. 295) Si la côte du Gabon est relativement bien décrite dès le XVIe siècle par les voyageurs portugais et hollandais, il faut attendre le XIXe siècle pour que les Européens nous renseignent sur les peuples de l’intérieur (Akélaguélo, 1984, p. 5). Les Vuvi appelés également Pubi et Pové sont une de ces ethnies de la grande forêt du Gabon central, la province de l’Ogooué-Lolo, région des bassins de l’Offoué et de la Lolo, à l’ouest de Koulamoutou. Ils constituent un groupe charnière entre, d’une part, les peuples de la côte, les Lumbu et les Punu, et du centre, les Tsogo et les Masango, et, d’autre part, à l’est, les groupes kota. Ils sont voisins des Nzabi. Ce petit peuple si méconnu mais intéressant, selon François Gaulme (1999, p. 168), résista à la colonisation française entre 1908 et 1912, armé de fusils mais surtout de sagaies empoisonnées (Histoire générale de l’AEF, 1908, p. 21). Un siècle plus tard, il se fait connaître par ses masques colorés de blanc, rouge ou noir aux formes épurées, à l’opposé du style réaliste des masques punu-lumbu de la savane : « Les caractères humains se résument à quelques traits sur un ovale blanc : un double arc de cercle appuyé sur un triangle plat devient des arcades sourcilières, les yeux et le nez. L’image-portrait devient ainsi un pictogramme, la réalité est devenue signe. » (Perrois et Grand-Dufay, 2005, p. 124-125). Les masques vuvi n’ont jamais fait l’objet d’une étude globale. Collectés après la Première Guerre mondiale et surtout dans les années 1930, ils ont fait partie de quelques grandes collections suisses et internationales comme celles d’Émile Chambon, de Josef Mueller, de Hans Himmelheber, de Han Coray ou de Hubert Goldet. Comme la plupart des masques blancs, ils furent attribués dans les années 1960 aux M’pongwé (M’pongoué), puis aux Fang et aux Tsogo. Bien que les masques ne respectent pas de frontières tribales strictes, « la plupart du temps, les confréries, dont les masques sont une des expressions, débordent de l’ethnie où elle s’est constituée sur toute la région environnante. C’est le cas du bwiti des Mitsogho. » (Perrois, 1979, p. 268). Vuvi et Tsogo sont des peuples bantu de l’intérieur du massif du Chaillu qui n’ont pas besoin d’interprètes pour se comprendre. La langue vuvi fut rapprochée du groupe tsogo par le linguiste français André Jacquot (1978, p. 495). Ils partagent une même culture qui s’est maintenue du fait de l’isolement de cette région montagneuse difficile d’accès. Ils pratiquent les mêmes rites initiatiques, le Bwete (Bwiti), le mwéli, chez les hommes, et le Nyembé (Ndjembe) chez les femmes.


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